Si tout le monde était comme Fúsi, le monde serait merveilleux.


Fúsi, c'est un type comme on en voit pas au cinéma. Un gars qui normalement a pas sa tronche placardée sur la devanture des cinémas, qui s'invite pas sur les tapis rouges et qui se tape pas Scarlett Johansson.
Lui, il a 43 piges, et ce qu'un type lambda appellerait probablement une vie pathétique en lui riant au nez. Obèse, il vit chez sa mère, bosse comme bagagier dans un aéroport mais n'a jamais quitté l'Islande. Pas d'appart, pas de copine, un physique ingrat. Une montagne barbue avec une calvitie naissante qui bouffe des Nesquik tous les matins, commande le même plat au même restaurant thaï du coin tous les vendredis, et trouve son réconfort dans la reconstitution de la bataille d'El Alamein avec son pote Rolf.


Un type solitaire, un loser pathétique peut-être, ancré dans sa zone de confort.
Et pourtant, si tout le monde était comme lui, le monde serait merveilleux.


Martyrisé et humilié par ses collègues de travail, moqué par l'amant de sa mère, Fúsi se réfugie solitaire sur sa reconstitution historique dans son salon. La solitude, le rejet, le harcèlement, il les accepte comme sa norme.
L'acceptance, en revanche, le désarme. Celle d'une petite fille, depuis peu sa voisine, se découvrant en cet ours timide inoffensif un compagnon de jeu, un ami. Fúsi se livre devant son innocence et s'attache à ce petit bout d'être humain, pur et honnête. Du genre qui n'a pas encore intégré comme anormal d'être puceau chez sa mère à 40 ans passés. Mais pour la société, un homme de 40 ans qui joue avec une petite fille, ça inquiète.


Quand il sort de son cocon, il en prend plein la gueule Fúsi. Arrêté pour avoir joué avec une petite fille privée d'attention par son père, contraint par ses collègues de conclure avec une prostituée après une partie de paintball...


Oui, mais si tout le monde était comme lui, le monde serait merveilleux.


Pour son anniversaire, Fúsi se voit offrir des cours de danse country et un chapeau de cowboy. Seulement tu le vois, lui, danser sur du Dolly Parton ? Pas le genre du type, alors il passe le cours dans sa bagnole dehors à écouter du métal.
Seulement, Fúsi a beau faire tout ce qu'il peut pour éviter le cours, il finira par faire la connaissance de Sjöfn. Une célibataire compliquée, parfois maniaque et dépressive, parfois enjouée et solaire. Un rayon de soleil dans la vie de Fúsi, une ouverture vers l'extérieur, qui va le pousser à révéler sa vraie nature.


Elle est là l'histoire du géant timide. Pas de conte de fées hollywoodien où le héros séduit la femme de ses rêves malgré ses défauts, pas de course poursuite dans un aéroport. Simplement celle d'un homme, dédié à une femme quand bien même elle le repousse, généreux au-delà de toute commune mesure, timide et emprunté mais toujours bienveillant.
Quel que soit le tournant pris par leur relation, vraie et compliquée, rien ne le détourne de sa générosité. Qu'il l'aide dans ses rêves professionnels, qu'il se plie à ses caprices sans broncher malgré sa souffrance, qu'il fasse passer Islands in the stream à la radio, Fúsi triomphe, même juste un peu, non pas en gagnant tous ses combats, mais en ayant bon coeur.


Personne n'est méchant dans ce film. Pas ceux qui le jugent, le martyrisent, pas Sjöfn qui le rejette et semble abuser de sa gentillesse, pas le père de la petite fille faisant arrêter Fúsi pour pédophilie. Tous sont simplement prisonniers de leur monde, de leurs problèmes. Seul Fúsi s'élève au-dessus de tout cela avec bienveillance et sympathie.
Alors oui, si tout le monde était comme lui, le monde serait merveilleux.
Si tout le monde était comme Fúsi. Un type qu'a le coeur sur la main. Une grosse main, mais surtout un coeur de géant.

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le 20 mars 2016

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