Réédité en Blu-Ray, L'homme au fusil s'il n'est pas un grand western malgré quelques coups d'éclat demeure un film plutôt rare qui mérite vraiment d'être redécouvert. Anticipant par moment le « western crépusculaire », ce film de Richard Wilson vaut surtout le coup d'œil pour admirer l'excellente interprétation d'un Robert Mitchum surprenant et touchant.


Un pistolero, joué par Leo Gordon second couteau récurent du western américain, arrive en ville à cheval. Le chien d'un petit garçon se met à lui aboyer dessus, et sans autre forme de procès... le cavalier lui tire une balle ! C'est par cette scène choc et rare dans le genre à l'époque, le film est sorti en 1955, que L'homme au fusil démarre. Et ainsi à plusieurs moments, une cruauté et une violence plus typique du western des années 1970 imprègnent une histoire qui d'un autre côté remplit totalement le cahier des charges du style classique d'alors avec notamment une « happy-end » convenue et un peu décevante. D'ailleurs, Michael Winner semble s'être beaucoup inspiré du premier film de Richard Wilson pour son Lawman de 1970, un pur et dur « western crépusculaire »., qui reprenait ce personnage de « pacificateur » redouté aussi bien par les bandits que par les villageois... Même si on pourrait reprocher à Wilson de ne pas tenir toutes les promesses de l'ouverture et d'avoir un peu le colt entre deux chaises en oscillant entre un certain nihilisme et un pur classicisme, l'ancien fidèle assistant d'Orson Welles s'en tire plutôt bien pour une première réalisation. Malgré la modestie du budget qui se ressent cruellement avec un village western « de carton-pâte », cet Homme au fusil se montre efficace et en 84 petites minutes, Robert Mitchum et le bon casting qui l'accompagne parviennent à maintenir une tension permanente.



ROBERT L'AMOUREUX


Le véritable atout du film est sans conteste la présence, d'ailleurs surprenante vu le peu de moyens de cette première production de Samuel Goldwyn Jr., d'un Robert Mitchum totalement investi dans son rôle ambigu de faiseur de veuves préoccupé par sa relation avec son ex-femme et sa fille. Avec sa nonchalance légendaire, il erre dans le film et dans le village tel un spectre annonçant une tragédie à venir. Épris d'une Jan Sterling à la la limite du rôle de maquerelle, « dragué » par la volontaire Karen Sharpe et l'ingénue Barbara Lawrence, Mitchum dévoile une mélancolie et une sensibilité qui à elles seules valent le détour. Il convient d'ailleurs de noter que les femmes ne font pas ici de la figuration et qu'elles influent fortement sur le récit. Parmi elles, on reconnaîtra la jeune et déjà très charmante Angie Dickinson dans l'un de ses premiers rôles.

La performance de Mitchum culmine lors de la meilleure scène du film, où alors qu'il vient d'apprendre la disparition d'un proche le nettoyeur de villes, promu assistant du shérif, pète littéralement un câble en allant provoquer un bandit, joué par l'excellent Ted DeCorsia, et en mettant le feu à son saloon. La scène nocturne avec le village en proie aux flammes et un Mitchum à la fois exalté et perdu, tel un malade, restera longtemps imprimée sur les rétines.


Malgré quelques faiblesses et une réalisation un peu trop neutre, le long-métrage de Richard Wilson évite toutefois les fioritures en allant à l'essentiel et s'avère donc clairement à redécouvrir pour les amateurs du genre et les fans de Robert Mitchum. Et avec ses accès de violence sèche et brutale, L'homme au fusil mine de rien annonce à sa manière l'arrivée du western plus ambigu et moins moraliste de la fin des années 1960.


( Retrouvez l'évaluation de la partie technique de l'édition Blu Ray-dvd de SIDONIS par ici : http://www.regard-critique.fr/rdvd/critique.php?ID=6930)

SB17
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le 23 juin 2022

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