Adaptation du dernier roman de Fleming qu'il ne finalisera pas lui même, il constitue un opus différent des autres, au moins pour un point : c'est le seul film ou Bond ne tue qu'un seul adversaire !
Décrié par beaucoup de fans comme l'un des moins aboutis, cet épisode de la sage n'en reste pas moins fascinant par certains aspects. Le méchant tout d'abord, Scaramanga, possède un nom et une stature inoubliables, tout comme son arme qui se démonte et se remonte à volonté. Bond ici enquête de manière plus réaliste, plus comme dans le premier film, Dr No. D'ailleurs le vilain habite aussi sur une île et c'est là que James Bond va le défier. Le parallèle s'arrête à car là ou Dr No avaient plusieurs hommes de mains, Scaramanaga n'a que le factieux Tric-Trac (Knick Knack en VO) pour le seconder. Scaramanga est un homme solitaire comme il le dit, qui pense se suffire à lui même, à l'image de Bond, à qui il se compare. Il y a l'utilisation du miroir entre ces deux personnages comme Fleming le faisait dans ses romans, celui dont est tiré le film, mais également Casino Royale,le premier roman, celui-ci étant le dernier, que Fleming n'a pas achevé lui même, la boucle est bouclée. Ce qu'il convient d'appeler une "nemesis". Le rôle est interprété avec rigueur et classe par Christopher Lee, lointain cousin de Fleming, de qui exhale un parfum de danger, d'absence d'empathie en même temps qu'il fait preuve de charme et de courtoisie. Car si Bond se défend de lui ressembler, il admets que Scaramenga sait vivre et apprécie ses mets et son vin. Il va même jusqu'à faire en sorte de lui ressembler physiquement afin de tromper son employeur. Scaramanga aussi a besoin de sexe, à la différence que lui veut soumettre sa partenaire. 007 se retrouve en fait devant ses propres pulsions, de vie et de mort. Notre héros doit donc se nettoyer de son propre côté obscur, avant de pouvoir terminer sa mission et se réunir une nouvelle fois avec une femme, représentante de la féminité recherchée par Bond. Il une nouvelle fois un Ulysse, un Saint George moderne.
A propos de femmes, et à classer dans les points négatifs, considérons le personnage de Mary Goodnight. Godiche gaffeuse, même si parfois utile à la mission, elle (d)étonne dans ce film. Comment a t-on pu imaginer un personnage aussi caricaturale et tant maltraité par Bond ? Celui-ci apparaît comme presque aussi mufle que dans Goldfinger quand il mettait une claque sur les fesse d'une fille en bikini dix ans plus tôt !
L'autre femme du film, Maud Adams fait également les frais de la brutalité de Mr Bond. Elle, au contraire de Mary Goodnight, est un femme plus contrastée, à la fois victime et bourreau, soumise et révoltée. Il y a donc un équilibre au final entre les deux personnages.
Apparemment la production a voulu renouer avec ce côté un peu plus dur de Bond. Si Moore s'y emploie sans broncher, on peut se demander si cela lui convenait en tant que choix d'interprétation du personnage. Ceci peut s'expliquer par le fait que la production à l'époque, avait traversé des épreuves, dues principalement aux difficultés financières de l'un des producteurs, Harry Saltzmann. La tension est palpable à travers le film. Peut être est-ce aussi cela qui provoque d'étranges fautes de goût, comme le fait de rajouter un son comique au moment d'une cascade spectaculaire ou le retour du shérif J.W Pepper. Cela et la présence du duo Hamilton-Mankiewicz aux commandes, comme pour les deux films précédents, fort heureusement pour leur dernière danse.
Autre choix artistique, celui de sacrifier à la mode des films dits "de Kung Fu", comme cela avait été le cas pour la blaxploitation dans le film précédent. D'ailleurs Opération Dragon était sortie l'année d'avant. Dans la même veine, on peut ensuite admirer le charme de Roger Moore vêtu en keikogi. C'est une de ses meilleurs tenues car la mode de l'époque est vraiment dépassée et les choix de certains costumes sont étranges pour le moins.
Difficile de leur en vouloir, tellement le film avec Bruce Lee a rendu hommage le premier aux films de Bond et notamment Dr. No, dans son style, son île et l'univers entourant un méchant mégalomane. Le film réutilise la scène ou Bruce Lee se retrouve entre plusieurs miroirs et permet encore d'appuyer la ressemblance entre Scaramanga et Bond, regardant chacun l'autre comme un reflet à la fois différent et similaire. Les apparentes oppositions revisitées en somme, qui conduisent à comprendre qu'il faut mettre de la lumière sur les ombres. Cette lumière à l'image du rayon solaire présenté ici, peut aussi devenir destructrice, comme elle l'est pour Icare. De plus Scaramanga compare lui même l'or avec le soleil. Tout comme Goldfinger avant lui il est le gardien de l'or, le dragon qui crache le feu et garde le trésor, le soleil au fond de chacun. Et le cycle de transcendance se complète lorsque le St George en costard cravate vainque le dragon, se nettoie symboliquement de sa crasse intérieure.
Pour les mélomanes, il est à noter que la partition musicale reste le point fort de la saga. A part la chanson titre tonitruante, elle est suave et excitante, composée par l'excellent John Barry comme toujours, jusqu'au film suivant tout du moins.
Les décors, la tonalité chromatique des images est perpétuellement dans les dorés, les bruns, l' ivoire et le mastic. Ce parti pris rend l'image belle, captivante et contribue à l'unicité du film.
Côté gadgets, par grand chose à part ceux du méchant, notamment avec une idée reprise à Fantomas, la voiture volante.
Au final un Bond sec, direct, encore trop parodique, avec néanmoins un beau duel d'acteurs et donc un adversaire à la hauteur de Bond.

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le 21 févr. 2015

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Fiuza

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