Je n'avais jamais entendu parler de ce film. D'ailleurs, il n'y avait aucune critique sur le site.
Je suis tombée dessus par hasard à la médiathèque, entourée de jeunes adolescents qui n'arrivaient pas à comprendre le classement par réalisateur ("Je ne trouve pas Resident Evil à la lettre R, y a que des films chelous en noir et blanc et un film avec Luchini déguisé en tapette" ( aka Perceval le Gallois)) et de retraités qui se jettent sur tous les films français sortis après l'apparition de la TNT (ils n'ont toujours pas réussi à maîtriser leur décodeur). Autant dire que chaque fois que je passe, des dizaines de films, dont La malédiction des hommes-chats et Le récupérateur de cadavres que personne n'emprunte jamais, attendent patiemment qu'un jour je les choisisse.
Un fois ramené mon butin de 40 dvds chez moi tous plus appétissants les uns que les autres, et trois jours pour les voir, j'ai dû procéder à un arbitrage. Et c'est David Bowie qui a gagné le créneau minuit-3 heures du matin. Il faut dire que la jaquette promettait un film culte, terme synonyme de "vieux films qui ont fait un flop à leur sortie qu'on essaye quand même d'amortir par tous les moyens" chez les éditeurs de dvds.
Bref. Tout commence par David Bowie qui déambule dans le désert en anorak à capuche pour aller mettre au clou des alliances dans une ville paumée, quelque part au fond des Etats-Unis. D'où vient-il ? D'ailleurs, selon le titre français qui spoile à mort. Où va-t-il ? C'est l'objet du film, le montage décousu intercalant des scènes de diverses lignes temporelles, passé, présent, futur, avec les différents protagonistes qui, a l'inverse du personnage de Bowie, vieillissent et se couvrent d'épaisses couches de fond de teint. On apprend progressivement qu'il est un des derniers représentants de son espèce, qui se meurt de soif sur une planète lointaine. Il est venu les sauver en leur ramenant de l'eau grâce à la navette spatiale qu'il fait construire après avoir fait fortune en déposant des brevets de haute technologie.
Parallèlement, il tombe en amour avec la femme de ménage d'un motel minable où il a échoué, lui et sa berline avec chauffeur, qui lui fait découvrir les deux mamelles (en plus des siennes) de la civilisation occidentale : l'alcool et le câble. Perdant progressivement pied dans le gin et le stupre, sans cesse harcelé par des visions de sa famille assoiffée en combinaison métallisée qui se roule dans le sable ou de ses anciens ébats sur trampoline avec de la mousse avec sa femme (mais est-ce vraiment de la mousse ?), il en oublie de mettre ses lentilles et sa perruque rousse, dévoilant à sa dulcinée ses yeux reptiliens et son crâne d'albâtre. (https://encrypted-tbn0.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcQYFtrdiiw04gguXx1yynOhqinZ2BkeafjagyYp07ITxjbzr6Lfug). C'est le début des ennuis qui le conduiront, entre autres, à apprendre à jouer au ping-pong avec une casquette à visière en vinyle vissée sur le crâne (http://www.timbouckley.com/blog/images/films/the_man_who_fell_to_earth.jpg).
David Bowie, parait-il, jouait avec 10 grammes de cocaïne par jour dans le nez. Il considère d'ailleurs que c'est sa meilleure performance, même s'il ne comprend toujours très bien comment il a fait. Qui a dit qu'être acteur était un métier difficile ? Mon lecteur de dvd, en surchauffe après trois heures de film muet, prenait un malin plaisir à figer l'image toutes les 30 minutes, choisissant toujours les scènes où David Bowie apparaît à poil. Je ne vais pas me plaindre, c'est quand même lui l'attraction principale du film.
Un film ambitieux, assez caractéristique des films de SF des années 70 qui se voulaient sérieux et intellectuels- on pourrait faire un parallèle avec Zardoz par exemple, la natte de Sean Connery trouvant son équivalent capillaire par la teinture bicolore rousse et blonde de David Bowie- mais handicapé par une forme un peu foutraque et poussive qui alourdit l'histoire. Et le film aurait gagné à avoir sa bande originale composée par David Bowie, mais ses contrats l'en ont empêché.
Une expérience au-delà du bizarre, disponible dans toutes les bonnes médiathèques, aux frais du contribuable.