L'Honneur du dragon par Ryo_Saeba
Deux ans après le carton d'Ong Bak qui révéla au monde entier le phénomène Tony Jaa, Prachya Pinkaew remet ça avec la même équipe mais cette fois il vise le marché international. Voici donc le tant attendu Tom Yum Goong, avec un budget revu à la hausse et tourné en majeure partie en Australie, à Sydney.
Tout d'abord, le principal intérêt du film étant bien évidemment les scènes d'action, il convient de donner au film deux poids deux mesures. Allons donc droit au but : que vaut l'action ? Et bien le réalisateur et son équipe ont tiré les enseignements des défauts d'Ong Bak pour nous fournir des scènes d'action encore meilleures et plus impressionnantes. Ainsi fini les multiples replay sur chaque petite cascade et également beaucoup moins de ralentis, ici bien mieux utilisés même s'il y a encore des abus sur certaines scènes (les combats dans l'église). Autre bon point : la mise en place de véritables "combats" contre des adversaires à la hauteur de Tony Jaa et surtout dans des styles différents du sien (Capoiera, Kung Fu, Catch ...) ce qui efface l'impression de "démo" omniprésente dans Ong Bak.
Au niveau de la mise en scène également, le réalisateur propose certains angles de vue et positions assez osés ainsi que quelques mini-plans séquences très réussis (notamment dans l'entrepôt) et un autre plan séquence de quatre minutes absolument monstrueux : Tony Jaa débarque dans un restaurant en forme de tour à plusieurs étages (hommage évident au Game of Death de Bruce Lee) et la caméra le suit pendant qu'il monte et dégomme tout ce qui se trouve sur son passage. Si dans un film comme Breaking News le plan séquence d'ouverture était une réussite technique mais pas forcément au niveau efficacité, dans Tom Yum Goong ce plan allie les deux.
Tony Jaa ne l'a jamais caché, son inspiration vient du cinéma de Hong Kong et c'est donc tout naturellement que parmi ces cascades, l'une d'entre elles est directement inspirée d'un mouvement de Yuen Biao dans le final de Dragons Forever, sauf que Tony Jaa fait un saut périlleux arrière pour agripper quelqu'un en mouvement (sur une moto, rien que ça) et non immobile. Alors certes, on peut reprocher à la réalisation d'être parfois très clippesque (la scène des rollers qui semble tout droit sortie du Riders de Gérard Pirès) mais dans l'ensemble il est indéniable qu'en attendant SPL (le dernier polar d'action très attendu en provenance de Hong-Kong), Tom Yum Goong est ce qui s'est fait de mieux au niveau action depuis ces 10 dernières années.
On serait donc tenté de dire que le pari est gagné et que Tom Yum Goong est une réussite. Ce serait effectivement vrai si le métrage ne durait que 45 minutes et ne se résumait qu'à son action. Seulement le film dure 1h45 et en dehors des scènes d'action, le résultat est assez catastrophique. Le scénario n'est pas très différent de celui d'Ong Bak sauf que la tête de Buddah est ici remplacée par deux éléphants. D'ailleurs, il s'avère même qu'au final ce n'est qu'une simple variation de l'histoire de vengeance présente depuis des années dans le cinéma de Kung Fu. A côté de cela, le réalisateur a tenté de faire vivre le film à travers de multiples affrontements de gangs qui en plus d'être complètement inintéressants, n'ont ni queue ni tête. Et ce ne sont pas les transitions ni le montage global qui vont arranger les choses. On passe parfois d'une scène à une autre sans trop d'explication, alors que la scène précédente n'est pas terminée, comme si on assistait à un pré-montage. Autre défaut assez gênant, les effets spéciaux pas toujours très réussis et beaucoup trop voyants. On citera par exemple la scène du rêve en synthèse dont l'animation est minimaliste, qui en plus d'être très cheap, n'a vraiment rien à faire ici ou encore le moment où Tony Jaa et son éléphant traversent une partie de la ville de Sydney, tournée sur écran bleu et terriblement mal incrustée.
Pour finir sur les défauts, citons le jeu désastreux des acteurs occidentaux complètement dénués de charisme. On se rend compte que les choses n'ont malheureusement pas énormément changé depuis les années 80 et les gweilos gueulards du cinéma de Hong Kong. Pour le reste des acteurs ça passe à peu près, Tony Jaa ne doit avoir que dix lignes de dialogues durant l'intégralité du métrage, son compère comique Petchthai Wongkamlao arrive à nous soutirer quelques sourires mais possède un accent qui rend son anglais absolument incompréhensible et Jing Xing est peut être le seul acteur crédible du film. Chose amusante, après Ong Bak et son sosie de Kitano, cette fois Tom Yum Goong nous offre un caméo d'un sosie de Jackie Chan.
Tom Yum Goong est donc une réussite au niveau de l'action mais un ratage complet sur tout le reste dû en grande partie à sa volonté de vouloir pénétrer le marché international.
En bref : Tom Yum Goong est un film bancal, une sorte de montagne russe : on monte doucement jusqu'à la pente et lorsque la scène d'action arrive, la montée d'adrénaline s'effectue puis on remonte à nouveau et ainsi de suite durant tout le film. La question est de savoir si l'adrénaline sera assez forte et durera assez longtemps pour vous faire patientez jusqu'à la suivante.