Une vie cinéphile est au fond très erratique. On arrive sur un site, on rencontre des gens de son département, de sa région même. On débute un ciné-kloub et on commence à peine à en prévoir d’autres que déjà la vie nous appelle ailleurs, dans une autre ville, loin des chaleurs provençales. Mais la vie cinéphile, c’est comme un chat, elle retombe toujours sur ses pattes. La ville dans laquelle on se retrouve a elle-aussi un ciné-kloub, qui a inspiré le premier, et on s’y retrouve invité. Alors certes, on perd en température ce qu’on gagne en longueur de manches, on perd en mojitos mais on gagne en tequilas. Le thème de la soirée était en effet mexicain (on remerciera l’hôte de la soirée, parfaite, et les autres membres présents, délicieux). Mais comme l’autre ciné-kloub, les règles sont insidieuses et cruelles : la critique est obligatoire (du moins pour le premier ; pour les membres historiques les règles me semblent plus légères et il ne serait en rien étonnant que cette critique soit la seule à ressortir de cette soirée). Alors, sans plus de présentations. Messieurs, mesdames.
Au début des années 1960, Elvis n’est pas mort. Il joue même dans des films pour promouvoir ses albums. Tel est le cas ici pour Fun in Acapulco, comédie musicale réalisée par Richard Thorpe.
Au Mexique, un jeune homme assez charmant est viré de son job sur un bateau après avoir refusé les avances d’une jeune fille certes accorte mais bien trop jeune. Il aura profité de ces quelques minutes pour pousser la chansonnette tant et si bien qu’un jeune garçon d’une dizaine d’années (orphelin, évidemment) va s’emparer de lui pour en faire sa nouvelle poule aux œufs d’or : aidé par ses multiples cousins (eh, il est mexicain, quoi de plus logique ?), il va l’aider à se reconvertir dans le spectacle musical hôtelier : une chanson par soir, une fois de temps en temps, rien de bien difficile ni contraignant. Le jeune homme accepte, mais appose une condition mystérieuse : il souhaite également être embauché comme maître-nageur à mi-temps.
On entre là dans la partie la moins réussie du film, qui est celle du trauma mystérieux du jeune américain, et de son passé trouble. Passé trouble finalement révélé dix minutes plus tard lors d’un flash-back plus que dispensable et puis complètement inutilisé durant le reste du film, jusqu’à la fin où cela reviendra comme un cheveu sur la soupe. Le scénario préfère s’intéresser le reste du temps à l’hésitation amoureuse du héros entre une torrero et la copine du maître-nageur. Elvis tente de jouer le beau-gosse ténébreux mais n’y arrive pas une seconde, la faute à un jeu d’acteur inexistant, laissant la vedette à Ursula Andress, pourtant restée célèbre pour ses maillots de bain plus que pour ses qualités d’actrice.
Il s’agit donc ici surtout de belles chansons entonnées par la magnifique voix d’Elvis, sur des thèmes puissants et parfois épiques (lors des chansons de corrida en l’honneur de Dolores) ou sur des thèmes plus triviaux et amoureux (lors de la chanson en voiture par exemple, avec Margarita), avec un semblant de scénario autour, pour expliquer que telle chanson puisse venir à cet endroit là alors que, cinq minutes auparavant, on n’aurait jamais pu y penser. D’ailleurs, il n’est pas rare de voir des séquences se terminer alors que rien ne s’y est passé juste parce qu’Elvis a pu placer sa chanson : c’est même souvent le cas lors des sorties en couple avec l’une des deux femmes. A la fin se rajoute en plus une histoire d’immigration sortie du chapeau. Mais tout est bien qui finit bien : Elvis repart aux Etats-Unis (ses parents lui ont envoyé une lettre lui expliquant qu’il pouvait rentrer, mais rien n’avait été dit sur une supposée interdiction précédente) avec son amigo et sa senorita. Allez, hasta luego !