Sur une île perdue au large des côtes irlandaises,un médecin mène des expériences afin de trouver un remède contre le cancer,qui était donc déjà un problème crucial en ces sixties finissantes.Mais ses manipulations tournent mal et donnent naissance à des créatures monstrueuses,les silicates,qui se mettent à exterminer les habitants du coin en les vidant de leurs os,pas moins!Le docteur local fait appel à deux éminents confrères londoniens qui,séance tenante,accourent sur place en compagnie d'une riche héritière,maîtresse de l'un d'eux,pour tenter d'éradiquer les sales bêtes.Comme en atteste ce résumé,voici un nanar kitsch et ringard de la plus belle eau.On est dans le délire et l'incohérence totale,et le film provoque une saine hilarité.Comportements absurdes des personnages,enchaînements d'évènements illogiques,charabia scientifique insensé,données médicales dépourvues de fondement,le menu est copieux.Mais le point d'orgue,ce sont les monstres,les fameux silicates,qui sont à crever de rire.Il s'agit de sortes d'aspirateurs avec un corps de serpent en guise de tuyau et franchement,ça vaut le déplacement et fait penser aux drôlatiques "Craignos Monsters" célébrés par Mad Movies.Pourtant,contre toute attente,le film recèle de vraies qualités.Terence Fisher,réalisateur phare de la série B fantastique anglaise des années 50-60,parvient à installer une ambiance agréable en contrepoint de l'ADN nanardesque de l'entreprise.Il nous plonge dans le décor froid,humide et isolé de cette île et joue à merveille du contraste entre les réactions ironiques et flegmatiques de personnages so british et l'horreur des situations qu'ils vivent.En creux,on peut même déceler une vive critique des dérives de la science,notamment à travers la figure du docteur West.Celui-ci,présenté au départ comme un dandy inconséquent,va finalement se révéler être un pragmatique sans états d'âme.On le voit couper le bras de son ami Stanley sans trop d'hésitation et,au moment où tout paraît perdu,il est prêt à euthanasier sa petite amie.Quand tout sera terminé,il n'hésitera pas à justifier les manipulations hasardeuses du docteur Phillips,au nom de la science et du progrès,sur l'air du "on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs",en dépit de toutes les morts causées par ces expériences et de la catastrophe bien plus grave encore qui aurait pu survenir.A ce propos,on s'attend au classique plan final,si typique du cinéma d'horreur,qui vient tout remettre en question.Et on va effectivement y avoir droit,mais pas de la manière attendue.On croit naturellement qu'on va nous montrer un silicate planqué dans un coin qui aurait survécu au massacre,mais la conclusion s'avère beaucoup plus maligne et cynique que ça.Les acteurs ne sont dans l'ensemble pas fameux mais Edward Judd et Peter Cushing,deux spécialistes du genre,forment un duo énergique et convaincant en savants combatifs et pugnaces.Il est à remarquer que le scénario semble inspiré par "L'île du docteur Moreau",le célèbre roman de H.G. Wells plusieurs fois porté au cinéma.