Un huis-clos prévisible accompagné d'une fatalité hors-champ fascinante.

Pour un documentariste, cette première fiction est impressionnante. Dans un documentaire, on voit tout aussitôt. On est dans l’explicite. Dans ce film, Leonardo Di Costanzo décide de renverser tout cela. Tout est implicite, tout est dans le non-dit. On sait ce qui se passe, mais on nous ne le montrera jamais. Ce qui est vraiment fort ici, c’est pas tant ce contraste, mais surtout le fait que nous avons là un film sur la Mafia napolitaine. Et avec ce film, la Mafia n’est que mentionnée, même si la pression de celle-ci pèse à chaque instant.

Tout au long du film, les deux personnages principaux sont dans l’attente. Plus les minutes et les heures passent, plus ils craignent le sort à venir. On pourrait résumer toute cette attente par un fatalisme auquel personne ne peut échapper. Ces deux jeunes adolescents sont destinés à un sort qu’ils redoutent. Un sort qui semble être peu indulgent. Mais voilà, il faut bien passer le temps. Car ils restent enfermés dans cet ancien asile psychiatrique toute la journée.

Et ce fatalisme reposera sur un hors-champ constant. En effet, les événements existent dans le film. Les personnages le savent. Le spectateur le sait également. Mais personne ne le voit. Le plus poignant dans cette fatalité, c’est que tout est abordé avec sérénité. Que ce soit les personnages ou la caméra, le tout est servi comme un rayon de lumière. Un côté lumineux au travers des atrocités mafieuses. Et dans ce rayon de lumière, dans ce hors-champ saisissant, on y retrouvera les deux adolescents.

Toute l’histoire reposera alors sur une relation. La fille, populaire du quartier, considère le garçon, qui est plutôt bien en chair, comme un débile. Et là vient le récit prévisible. Le film se sert des clichés de jeunes gens et les mets en face à face. Tout d’abord, ils ne veulent pas se voir. Et ne peuvent pas se voir. Au fil du temps, ils seront forcés de tisser des liens pour tuer le temps. On efface l’ennui et la solitude en créant une complicité avec l’autre. Donc, à cause de ces nombreux clichés, l’évolution de ces personnages se sent dès les premières scènes.

Au-delà de ces clichés et du récit prévisible, Leonardo Di Costanzo a eu une brillante idée. Le face à face entre ces deux adolescents se fait dans un huis-clos. Mais pas n’importe quel huis-clos, puisque l’intérieur est vide, sombre et poussiéreux. Un huis-clos qui en devient angoissant. Il suffit déjà de regarder où est la caméra pendant le film. Elle ne quitte jamais la propriété dans laquelle les deux adolescents sont enfermés. Sans moyen de s’échapper.

Mais la relation entre les deux adolescents nous ressort comme un jeu. Un jeu d’enfants. Entre les fois où il se cachent, où il faut trouver un endroit pour pisser, où on veut causer avec un oiseau. Ou encore, cette séquence où ils partent à la découverte d’endroits cachés de la propriété. Ils cueillent des fleurs, sont émus devant une chienne et sa portée, jouent à Koh Lanta, etc. Le film livre un savoureux mélange entre angoisse et naïveté.

Cette propriété devient, par le récit et la réalisation, un vaste espace des possibilités. Malgré cela, le film paraît en vain trop timide. Leonardo Di Costanzo ne fera jamais en sorte de pousser un plus ses situations. C’est aux premiers abords fascinant, mais seule la réalisation nous reste fascinante. Le pitch est bien plus poignant que le déroulement du récit dans le film. Ce déroulement du fatalisme contemporain, étalé sur une journée, n’en paraît que plus long. Cette longueur ne sert pas le film. Tant par ses plans séquences que par ses scènes qui s’étirent.

Finalement, L’Intervallo est un film inégal. Leonardo Di Costanzo, documentariste, réalise ici sa première fiction. Toute la timidité de la première fois y est. Et malgré le lâché prise sur les clichés, le pitch reste tout de même passionnant. Dommage que l’attente soit aussi longue. Une attente qui se traduit par la sérénité dont fait preuve les personnages et la réalisation, car tout est dans le hors-champ. Un rayon de lumière dans le quotidien napolitain. Un huis-clos prévisible pour une réponse au fatalisme fascinante.

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Auteur : Teddy
LeBlogDuCinéma
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le 23 mai 2013

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