L'Intruse
6.3
L'Intruse

Film de Alfred E. Green (1935)

Les yeux de Bette dans le code Hayes

Même s'il apparait aujourd'hui comme une œuvre de second plan dans l'histoire hollywoodienne, "L'intruse" est pourtant fut pourtant déterminant dans la carrière et plus encore dans la génèse de la légende Bette Davies. Le tournage sulfureux , (comme c'était de coutume à l'époque dans cet univers de tous les excès), est notamment à l'origine de l'inimitié entre Bette et Joan Crawford qui trouvera son expression ultime dans le somptueux "baby Jane", la première nommée en actrice perfectionniste, séduira en effet, Franchot Tone son partenaire durant le tournage, qui était également et accessoirement l'amant de Crawford .


Le réalisateur, Alfred E. Green lui devra composer avec l'expression des premières exigences artistiques de la belle aux grands yeux, qui demandera par exemple à n’utiliser, dans la première moitié du film, que des vêtements simples et usagés qui la font paraître très ordinaire, pour donner de la profondeur à son personnage d'actrice de théâtre déchue et devenue alcoolique.

Dans un registre alors inhabituel de femme fragile, névrotique, mais dans un jeu tout en retenue, Bette Davis crève l'écran dans la peau d'une ancienne star "ramassée" ivre dans un bar par un jeune architecte New-Yorkais en vogue et ancien admirateur, qui la conduira par pitié et bonté d'âme dans sa maison de campagne pour qu' elle puisse s'y ressourcer. Don Bellows est fiancé et il n'est question que d'amitié sincère dans les premiers jours d'une rencontre qui c'est inévitable va peu à peu se transformer en un sentiment plus ambigu, lors de magnifiques scènes de séduction où les regards de l'actrice à la fois candides sincères puis amoureux sont d'une intensité exceptionnelle.


La transformation de Joyce Heath en jeune femme goûtant de nouveau aux plaisirs de la vie est accompagnée d'une belle performance d'actrice de Bettie, déployant une multitude d'émotions de caractères éclipsant les autres acteurs, et soudain, celle qui était considérée comme une actrice mineure de La Warner, car pas assez jolie devient une femme de talent au physique atypique. E. Arnot Robertson écrira dans Picture Post: ‘’Je pense que Bette Davis aurait probablement été brûlée comme sorcière si elle avait vécu deux ou trois siècles auparavant. Elle donne le curieux sentiment d’être chargée d’une puissance qui ne peut pas trouver de débouché’’., tandis que le New York Times la décrira comme "devenant une de nos actrices les plus intéressantes".

Mais, au delà de la performance qui vaudra son premier Oscar à la comédienne, "L'intruse" fait figure d'excellent mélodrame, aux ressorts moins convenus qu'il n'y parait, jusque dans son dénouement moraliste dicté par un souci de respect du code Hayes, mais qui donne une tournure tout à fait inattendue à ce séduisant récit.

Yoshii
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Oubliés, bis ou méconnus

Créée

le 19 mai 2024

Critique lue 34 fois

8 j'aime

Yoshii

Écrit par

Critique lue 34 fois

8

D'autres avis sur L'Intruse

L'Intruse
Plume231
5

More insufficient than dangerous !!!

J'ai toujours pensé que Bette Davis a atteint le meilleur dans ses interprétations dans les années 50 et 60, trouvant son jeu dans les films des années 30 et 40 un peu trop stylisé, parfois...

le 21 juil. 2016

5 j'aime

L'Intruse
constancepillerault
6

Critique de L'Intruse par constancepillerault

Film qui tient du mélodrame, découvert à la Cinémathèque, dans une rétrospective consacrée à la Warner, pour les 100 ans de la compagnie . Si la forme est satisfaisante, et l'interprétation bonne...

le 3 mai 2023

2 j'aime

2

L'Intruse
YgorParizel
8

Critique de L'Intruse par Ygor Parizel

Un bon drame porté par la formidable Bette Davis qui offre une de ses plus belles prestations dans ce film. L'histoire de cette comédienne maudite qui est relancée par un mécène est vraiment bien...

le 14 sept. 2016

2 j'aime

Du même critique

Civil War
Yoshii
8

« Nous avons rencontré notre ennemi et c'est nous encore » *

Jamais peut-être depuis 1938 (et le canular fabuleux d'Orson Welles, qui le temps d'une représentation radiophonique de "La guerre des mondes" sema la panique aux Etats-Unis), une illustration...

le 15 avr. 2024

116 j'aime

23

Il reste encore demain
Yoshii
8

Des lendemains qui tabassent

Sorti en Italie au cœur de la vague d'indignation suscitée par l'assassinat de Giulia Cecchettin par son ancien petit ami (le 106ème féminicide en 2023 de l'autre côté des alpes), "C'è ancora...

le 12 mars 2024

87 j'aime

3

Furiosa - Une saga Mad Max
Yoshii
9

In George we trust

Lorsqu’en 2015, George Miller, révolutionnait le film d’action (et le post-apo) avec le sidérant Fury road, certains y voyaient un acte ultime, un chant du cygne magnifique, une œuvre inégalable et...

le 22 mai 2024

84 j'aime

14