Agnès Varda est une femme, et ça se sent.
Ce film est un plaidoyer féministe de 2 heures, dénonçant les difficiles frictions entre libération de la femme et application aux faits.
Pauline et Suzanne vont vivre leurs vies en parallèle, chacune à sa façon, à son rythme, en correspondant épisodiquement, le plus souvent par cartes postales, sans en dire trop.
Nous suivons les deux et découvrons avec elles plusieurs tranches de vies.
Pauline - dite Pomme est chanteuse (celle qui chante d’après le titre), elle est libérée, se bat pour un oui ou pour un non, vit une vie de bohème et d’aventures. La fille bien ancrée dans son temps, la soixante-huitarde sûre de ses convictions, quitte à connaitre quelques déceptions.
Elle retrouve Suzanne (celle qui “pas” d’après le titre), une vague connaissance un peu plus âgée. Suzanne a l’air blasée, elle est mère de deux enfants, le père est marié à une autre, et elle voit avec appréhension se profiler sa troisième grossesse. L’angoisse absolue pour la libre Pomme.
De ces retrouvailles fortuites va naitre une amitié à la fois simple et intense, renforcée et magnifiée par les séparations des deux filles.
Le film évoque beaucoup de choses avec justesse:
la comparaison entre les deux héroïne peut sembler parfois trop simpliste, mais elles vivent toutes deux des surprises, pas toujours bonnes, qui donnent du corps à leurs vies.
Leurs rapports ne sont pas toujours idylliques, elles se retrouvent en n’ayant rien à se dire, puis se font des révélations sur le passé, une vraie amitié imparfaite, réaliste.
La condition de la femme est centrale et ponctue l’ensemble du film: fille mère, femme soumise à son mari, femme au boulot, avec les enfants, avec ses parents, bref tout y passe.
Bien sûr, la question centrale est celle de la maternité, de l’avortement (le film date de 1976), de la liberté de la femme à disposer de son corps, des sujets très féminins et brulants qui ont marqué l’époque.
L’ensemble se suit sans problème, sans juger ni l’une ni l’autre des héroïnes, mais en prenant conscience des différences et similitudes avec notre quotidien, de l’actualité de certaines questions, ou au contraire de l’avancée sur certains terrains (et peut être aussi des combats menés encore dans d’autres pays).
Un film sensible et bien rythmé par les titres de Pomme qui sont à son image: bohèmes, revendicateurs, rêveurs, mais avec un fond de vérité et de sincérité.
Un film engagé, très à gauche, mais qui reflète son époque et se savoure avec la nostalgie d’un temps que pourtant je n’ai pas connu.