Un film témoignage sur la guerre d'Indochine

Engagé dans la guerre d'Indochine, Pierre Schoendoerffer nous relate ici son expérience ; et on sent qu'il y a du vécu. On aura le même sentiment avec Platoon 20 ans plus tard.

On est proche du documentaire avec ce film, la musique laisse souvent la place aux sons naturels de la jungle indochinoise.

Les portraits des protagonistes sont très réalistes aussi. Bruno Cremer incarne l'adjudant alsacien, vétéran du front russe avec l'armée allemande, face auquel le jeune sous-lieutenant sortant de Saint-Cyr interprété par Jacques Perrin doit trouver sa place. Il s'agit d'un cas de figure qui s'est inévitablement présenté à de nombreuses reprises dans ce conflit puisque l'armée française n'était constituée que de volontaires. Un nombre important de ces derniers n'en était donc pas à leur première guerre.

Ce thème est également abordé dans "Par le sang versé" car la légion était alors composée pour au moins la moitié d'anciens soldats allemands et parfois des officiers revenus au bas de l'échelle. Ils devaient être commandés par de jeunes officiers forcément moins expérimentés.

C'est pour cela que les deux personnages principaux sont extrêmement bien écrits.

Wilsdorf ne semble savoir faire que la guerre (il mourra en Algérie), il n'est pas pressé de rentrer en France et rêve de rester vivre en Indochine. On retrouve souvent cette fascination pour ce pays et ce peuple chez les anciens d'Indochine.

Torrens est un jeune officier idéaliste qui doit composer avec le pragmatisme de son chevronné adjudant, qui est prêt a risquer sa vie pour récupérer une arme mais aussi à abandonner les soldats blessés qui n'ont pas de chance de survie.

Néanmoins, un respect mutuel se crée entre les deux. Wilsdorf comprend que l'idéalisme de Torrens est dû à son inexpérience. Peut-etre était-il comme cela avant de connaître la guerre ?

Torrens a l'intelligence d'admettre que son aîné a malheureusement "tout le temps raison".

Ce film est donc un réel témoignage et un bel hommage, qui ne porte pas de jugement.

À titre personnel, cela m'a rappelé ce vieux monsieur de la maison de retraite qui se prénommait Paul, que j'ai toujours vu marchant seul, vétéran des guerres d'Indochine et d'Algérie. Il nous rappelait quelques souvenirs de cette guerre : "Les viets c'étaient des durs" ou "Levez le camp, ils vont vous coupez les c..."