Profane que je suis, je l'ai préféré au peu que j'ai vu jusqu'ici de la Nouvelle Vague alors qu'il n'est classé que 35ème dans le top qui lui est consacré et c'est Jacques Demy à la réalisation, non Godard ou Truffaut. Mieux que les 400 coups, mieux que Pierrot le Fou. A mon tour de me demander ce qu'est exactement que le cinéma ! Mieux qu'à bout de souffle, imprimé d'un rythme plus lent dans sa course vers le néant. Peut-être ai-je eu moins de difficultés à me sentir proche d'un addict au jeu que d'un petit gangster.
Dois-je me flageller? Me rebeller? Je n'ai pas encore la culture suffisante pour assumer et pourtant me voilà à rédiger ma critique. Ce n'est point du Mépris mais je dis : Tant pis. Ce film m'a touché. Tout y est dans une forme condensée, brute. Efficace.
En 1h20, Jacques Demy nous fait vivre l'aventure palpitante de Jean Fournier, jeune employé de banque vivant chez papa, découvrant les joies du casino et l'amour, puis irrémédiablement ses peines. Forcément, il n'y a pas de place pour les temps morts, on se laisse agréablement emporter et pourtant le cerveau turbine.
Il ne s'agit toutefois pas d'une course contre la montre, le temps sait être pris lorsqu'il le faut et le spectateur se sent vibrer, peut-être pas autant que les personnages, à la vue de cette bille qui tourne dans la roulette. L'effet escompté est atteint!
Suis-je sensible à ce point au rythme ?
Si je devais définir ce film en un mot, ce serait : efficace.
Efficace dans son rythme mais aussi dans chaque parcelle de ce qui fait un film.
Efficace dans son découpage. Passage habile d'une scène à une autre. Sans même s'en rendre compte, on part pour un point B et on arrive au point C. Coupé au millimètre pour n'y laisser que l'essentiel.
Efficace dans la photographie. Les contrastes du noir et blanc. La symbolique qui se dégage des couleurs, notamment dans les costumes est évidente.
Efficace dans ses cadrages. L'effet de récence nous laissera surtout en mémoire le plan qui clôture le film.
Efficace dans sa musique. Imprimée par touche. De piano.
Efficace dans son jeu d'acteurs. Tout en justesse : Jeanne Moreau en MILF addict (j'espère faire dresser quelques cheveux, pourquoi pas blonds platine) et Claude Mann en contrasté jeune candide lucide emporté malgré lui par la première.
Efficace dans son scénario. A l'image de la Nouvelle Vague, épuré. Simple et complexe à la fois. Intelligent, il ne tombe pas dans le piège du film qui nous sert une morale sur un plateau.
Et finalement, efficace dans sa conclusion qui ne s'éternise pas.