C'est une sorte de road-movie autour d'un jeune soldat de la guerre de Corée amoureux d'une fille qui tue un certain nombre de gens. Au fond, c'est un peu un Rambo (First blood) dans les années 1950, avec une fille dans les pattes, et les thématiques chères à Terence Mallick.
Le road-movie est toujours l'occasion d'une radiographie de l'Amérique, et le film développe un sentiment très intime de cette Amérique des fifties où les maisons délabrées côtoient les pavillons pimpants à quelques rues. Martin Sheen a un profond accent du Sud, un air d'adolescent costaud mais déjà vieilli, et bien sûr la touche James Dean. C'est assez bien joué, car il donne l'impression de se donner du mal à imiter Dean, un équilibre dur à trouver. Stella , de son côté, apporte une touche seventies au film.
Visuellement, c'est souvent assez sage, avec beaucoup de plans fixes, et quelques plans séquences. Mallick mise avant tout sur la beauté plastique, avec un amour immodéré pour les vieux panneaux délabrés, les tôles rouillées et des trognes de l'Amérique profonde qui rappellent la peinture de Hopper.
Le symbolisme employé, en revanche, est un peu sentimental et pas très fin, par moments (le flotteur avec marqué "Bait" ; le ballon rouge avec le mot d'amour). Les limites de la Sundance Touch.Les paysages font un peu carte postale, mais sont beaux quand même, notamment la traversée du désert. C'est beau, pas incandescent.
La musique au glockenspiel, ce n'est pas mon trip, mais pourquoi pas.
Au fond, ce qui me retient le plus, c'est que tous les personnages ont une espèce de sensibilité artistique hors-norme : le père d'Holly est peintre, Kit enregistre sa voix sur un 33 tours ; en fuite, elle regarde des diapos stéréoscopiques, Kit tire au revolver sur un ballon de foot, etc.. Ce n'est pas très crédible, ou à tout le moins maniéré.
Synopsis.
Montage alterné : Holly, une adolescente, dans son lit, expose en voix off sa situation familiale (décès de sa mère, déménagement) et Kit, un jeune James Dean demande des cigarettes en faisant les poubelles. Elle a 15 ans, lui 25 et il revient de Corée. Ils sortent ensemble. Quand son père l'apprend, il abat son chien.
Kit essaie de parler avec le père, qui refuse. Il entre dans la maison, prépare la valise d'Holly, tombe sur le père, qui veut appeler la police. Il le tue. Ils incendient la maison avec un enregistrement laissant croire qu'ils se sont immolés.
Ils fuient vers le Nord, construisent une cabane dans les bois et y restent. Il pêche, elle lui lit Moby Dick. Des marshalls les retrouvent : il les tue par surprise. Ils vont voir Cato, un ami qui vit dans une ferme isolée. Kit le tue sans véritable raison, ainsi qu'un couple qui se montre ensuite. Ils sont poursuivis. Se réfugient dans une grande maison, dont il séquestre le riche propriétaire. Ils traversent les plaines vides du Dakota du sud. Ils s'arrêtent à un puits de forage pour demander de l'essence, mais un hélicoptère arrive. Galvanisé, Kit, veut se le faire,mais Holly lui dit qu'elle veut s'arrêter là. Il part sans elle, en lui laissant un point de rendez-vous.
Il met en scène sa reddition : il sème la voiture de police, tire dans son pneu, se rend après avoir construit un bizarre monticule de pierres. L'armée le détient dans un camp le temps qu'il soit rapatrié pour être jugé, et condamné six mois plus tard à la chaise électrique.
Badlands est un beau film, avec des acteurs convaincants et impliqués et une esthétique personnelle, quoiqu'un peu enfantine. La thématique de Kit, qui recherche une belle mort de manière un peu narcissique, est intéressante mais le personnage féminin manque singulièrement de relief, à mon sens du moins.