Incroyable. Tout simplement incroyable. La dernière fois que le cinéma pré-années 70 m'avait autant emballé, c'était pour le Scarface de Hawks, qui se révélait d'un rythme tout à fait apte à rivaliser avec nos films de gangsters modernes. Tourné dans un style presque documentaire, chargé de contexte politique et de séquences sous tension (les nombreux attentats qui parsèment le film, les opérations militaires...), multipliant les dialogues abordant les thématiques de la révolution, de l'indépendance, de la légalité et de la légitimité des actions de guerilla... Ce film n'a rien perdu de son impact, ne ment jamais ni ne minimise ses thématiques, et se révèle tout simplement être un des meilleurs films de guerre, pour peu qu'on apprécie le mélange politique/action. La comparaison avec Troupe d'élite n'est pas volée, on tient là une mécanique bien huilée qui cherche constamment à embrasser le réel dans toute sa complexité, qui plus est en restant fidèle à la réalité historique (à quelques noms de personnages près). J'avais un petit doute sur la pose de la première bombe (installée par une équipe de français (blancs) dirigée par un commissaire au milieu d'un quartier musulman), et dans la réalité, c'est en effet un groupe pour l'Algérie française qui avait organisé l'attentat rue de Thèbes (en réaction à la vague d'attentats qui avait lieu le mois précédent). Escalade armée, terrorisme (la séquence de la fusillade en camion rappellera un peu d'actualité), répression militaire, l'escalade est édifiante et la progression magistralement synthétisée.
Tourné comme un film et scénarisé comme un reportage condensant les points de vue, La bataille d'Alger est probablement le meilleur film qui traite du sujet, loin des partis pris. Sa seule lacune serait d'avoir complètement gardé à distance les faits dans l'arrière-pays, auxquels on fait allusion, mais qui nous auraient éloigné d'Alger. Parfait pour se remettre au point sur le sujet tout en vivant un vrai moment de cinéma.