À l’instar de la domination de l’Axe en Europe, la guerre du Pacifique s’inscrit également comme l’un des tournants de la Seconde Guerre Mondiale, dans sa globalité. Ce front est vaste et est dominé par un Océan et un ciel neutre, jusqu’à ce que la cicatrice de Pearl Harbor s’exprime d’elle-même. Les Américains entrent en guerre, face à des japonais préparés et un amiral stratège des plus expérimentés. On comprend que les enjeux sont cruciaux et Jack Smight cherche à mettre en valeur le courage de l’US Navy, tout comme le bras de fer des hauts commandements. Le metteur en scène œuvre pleinement à glorifier les Etats-Unis, mais avec une once de nuance dans certains discours, à croire que les tenants et les aboutissants de la guerre se résume plus à de la chance, qu’à une tactique supérieure.
Du raid de Doolittle à la bataille de la mer de Corail, l’échiquier ne cesse de varier, mais tout repose sur la domination territoriale, au beau milieu de l’océan, à mi-chemin entre les deux nations qui s’opposent. Le fond du sujet, c’est bien l’inspiration tactique qui servira de tremplin pour l’aviation. La maîtrise de l’espace et du timing est primordiale et le film ancre son récit dans les faits, marquants afin qu’on ne s’y perde pas. Malheureusement, passé une certaine génération, l’œuvre parlera à peu, mais continuera d’exposer ses nuances dans une guerre qui a vu naître et sombrer des héros. Parmi eux, l’amiral Isoruko Yamamoto (Toshirô Mifune) possède toujours un coup d’avance. Il n’est pas du tout caricaturé, faisant ainsi honneur aux japonais tombés dans cette bataille aéronavale. La démarche a de quoi rendre perplexe, car le commandement américain est souvent à la traîne et dans l’embarras. Mais ce sont bien eux qui auront l’avantage sur la reconnaissance et la visibilité afin de mieux contrer les mouvements de l’adversaire.
Le casting de prestige justifie à lui-seul, l’implication d’une nation dévouée et qui mise tout sur un unique front. Charlton Heston, Henry Fonda, James Coburn, Glenn Ford, Hal Holbrook et Robert Mitchum ont déjà de quoi nous faire perdre la tête, mais c’est un plaisir à contempler. On ne cherche pas non plus à nous immerger dans le fond de la bataille, car le film ne revendique en rien une certaine haine vis-à-vis d’un des camps. Cependant, une brève intrigue romantique nous mène à l’internement des Nippo-Américains, le tout sur le dos de la guerre. On y fait mention, mais l’âme du sujet est bien dans la Pacifique, là où le plus opportuniste aura le dernier mot. Tout au long du métrage, on souligne des défaillances et des maladresses qui font de la guerre un art abstrait, misant sur l’instinct et le contrôle de soi.
« La Bataille de Midway », c’est un coup de poker qui redonne du prestige à l’aviation Américaine, mise à mal dans les premiers pas de la guerre. Mais le défi est de rendre l’affrontement cinématographiquement crédible. C’est pourquoi les combats sont entrecoupés d’images d’archive, ce qui ajoute un sentiment d’authenticité. D’ailleurs, le film n’hésite pas à emprunter quelques passages de « 30 Secondes sur Tokyo » et de « Tora ! Tora ! Tora ! » afin de bien démarrer dans l’intensité et dans l’urgence. Il s’agit d’une course contre la montre et l’équipe de montage l’a bien compris. De cette bataille, on peut relever un souffle documentaire, qui restera pour la plupart des spectateurs d’aujourd’hui une leçon de morale. Celui de l’épique est à éviter, car tout l’intérêt de l’œuvre est de nuancer une victoire inespérée.