Comment aborder un film aussi complexe, aussi ambitieux et malheureusement aussi inégal que cette Belle endormie de Marco Bellocchio?
L'écriture est trop inégale. Les histoires racontées souffrent souvent lorsqu’elles s’entrelacent parce que c’est précisément à ce moment-là que se révèle leur évidente disparité dans l’inspiration, la structure et l’écriture.
C'est bien qu’une actrice comme Isabelle Huppert se sente à l'aise avec une écriture ferme qui lui laisse de la place pour montrer toutes les ficelles de son métier d'actrice ! Et Bellocchio lui donne des lieux, des objets, des meubles, des religieuses/soignantes avec lesquelles prier et s'occuper, une présence silencieuse à l'intérieur de la maison, une fille dans le coma ; Aussi le conflit avec un fils, qui aimerait être reconnu comme tel, et un ex-mari qui lui rendent visite plus dans l'espoir de rompre la symbiose mère/fille que dans le désir de rencontrer ces deux femmes. Les scénaristes offrent également à la mater dolorosa Huppert son ancien métier d'actrice, une supériorité dominante dans les relations et une dépression psychique subtile mais de plus en plus évidente. Il est clair qu'avec tout cela, cette partie de l'histoire a un poids incroyable pour la fixer dans la mémoire... et que Huppert, en tant que grande comédienne, est merveilleusement à l'aise.
L’histoire qui se déroule à partir du duo père/fille ( Toni Servillo , Alba Rohrwacher ) est la plus liée à la réalité et, malgré sa complexité, elle progresse bien. L'espace de la colère et de l'abandon amoureux, des liens familiaux qui se brisent en présence d’une Rohrwacher toujours excellente. C'est l'histoire discontinue de l'homme politique Servillo, en crise d'identité et sur le point de tout abandonner.
Pier Giorgio est un excellent acteur, mais les scénaristes lui laissent, en héritage gênant, des phrases qui sont des stéréotypes, des scènes clés avec des prêtres ou des collègues peu fiables et trop de colère impuissante. Il semblerait presque que le réalisateur souhaite que nous réfléchissions davantage à sa dynamique personnelle avec son fils acteur qu'à autre chose. Ou que, nouvel Abraham, il a sacrifié son propre fils au dieu du cinéma. Pourtant, la fin est belle avec la (patiente) Sansa enlevant délicatement les chaussures du (soignant) Looker, rappelant la folle solitude de la dernière scène hupperienne dans laquelle la française enlevait seule ses chaussures pour s'accroupir sur le canapé d'un soignant vide. .
Le film ne trouve finalement pas d'équilibre entre les scènes qui relèvent d'une lecture fantastique, presque onirique de la réalité et des histoires dans lesquelles l'absence de rêves renvoie à une platitude exécutive humiliante.