Il y a des acteurs qui ne chômaient pas au début des années 50, et Rock Hudson est de ceux-là. Il peaufinait ses apparitions sautillantes à la Douglas Fairbank et son allure athlétique de nageur dans des histoires pas forcément inoubliables, où il tenait des rôles de jeune premier idéaliste et parfois un peu naïf. C'est encore une fois le cas ici. Sûr de lui, il se joue de la Marine et fait passer du cognac en contrebande. Pas vraiment un exemple pour la jeunesse, mais, au moment où il met la main sur une beauté qu'il soupçonne de trahir l'Angleterre au profit de la France, son sang ne fait qu'un tour et il la ficelle proprement avant de la balader sur son épaule comme un primate chevronné. Eh oui, on ne rigolait pas avec le patriotisme ni avec les bonnes manières, en 1953. Je suppose que le film lorgnait un peu du côté de la comédie, si j'en juge par les petits battements frénétiques des pieds de la belle tandis qu'elle se fait manutentionner comme un jambon de Bayonne, mais je ne peux pas en être certaine, je ne possède pas les capteurs nécessaires. C'est comme pour l'humidité dans l'air, je suis obligée de consulter des gens mieux équipés que moi. Bref, j'ai malgré tout suivi avec un intérêt relatif cette affaire de pigeon voyageur qui doit mettre Napoléon dans l'embarras en emportant avec lui les emplacements secrets de sa flotte. Le plus marrant, en fait, c'était le décalage qui existe désormais entre l'espionnage artisanal de l'époque de l'Empereur (à peine s'il évoque à mots couverts la torture par laquelle on arrachait des informations à l'ennemi, fût-il joli comme un cœur...) et les débauches actuelles de gadgets tueurs ou indiscrets. A l'époque, on en était encore au bon vieux mensonge, assorti d'une menue supercherie grosse comme le nez au milieu de la figure, et le meilleur policier de France n'avait que ses soupçons pour déclencher une contre-offensive basée sur une surveillance discrète dans les bois par une bande d'entricornés voyants comme une Mustang jaune poussin sur le parking du Leclerc. Mais bon, ça fait tout le charme de ces vieux films aux doublages assurés par les 3 mêmes personnes à l'accent délicieusement suranné.