La Belle et la Bête
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La Belle et la Bête

Long-métrage d'animation de Gary Trousdale et Kirk Wise (1991)

Il était une fois, dans la réalité, une petite fille regardant beaucoup de Disney.

Bien qu'elle continua d'aimer les films destinés au jeune public en grandissant, l'enfant était devenue sarcastique, cynique et immature.

Lorsqu'elle devint enfin adulte, et était restée cynique, elle voulut, néanmoins, revoir les films de son enfance et se créa un compte Disney+ où l'on pouvait trouver les contenus Disney du passé, du présent et du futur.

Voyant, parmi eux, l'une des créations des Studios qu'elle avait toujours évité depuis la première fois où elle l'avait vu, la femme frémit de dégoût et voulut voir Aladdin. Néanmoins, elle se demandait si ce film était aussi répugnant que dans ses souvenirs et se dit que ce serait bien de le revoir afin de le massacrer sur SensCritique.

Lorsqu'elle lança le film qu'elle avait voulu éviter, l'envie de descendre le film de façon jouissive s'évapora pour laisser place à de fortes émotions et de l'émerveillement.

L'adulte voulut arrêter le film mais il était trop tard; car l'enfant émotive avait pris le dessus sur l'adulte cynique.

En punition, elle se maudit d'avoir été aveugle et se terra dans sa chambre en refusant d'admettre l'évidence: le film qu'elle pensait être une daube était, en réalité, un très bon film.

Ne voulant pas renier ce qu'elle avait ressenti, elle décida de faire ce qu'elle avait prévu: critiquer le film sur SensCritique. Même si elle avait prévu d'en dire du mal, elle ne voulut pas le faire car elle ne voulait pas mentir sur ce qu'elle avait ressenti.

Elle s'en moquait que ce film était impopulaire et était vu comme douteux car elle pensait que ceux l'ayant décrit comme une daube ne l'avaient jugé que par rapport aux avis des cyniques se croyant intelligents car regarder de haut un film pour le jeune public serait soi-disant une preuve d'avoir atteint l'âge adulte. Et surtout, elle s'imaginait que le juger comme étant une daube était juger ce film comme un livre qu'on juge à sa couverture.

En gros, en le jugeant sur son apparence.

Mais quel était donc ce film à cause duquel la femme adulte se prenait tant la tête?

Il s'agissait de La Belle et la Bête.

Malgré l'échec cuisant de Bernard et Bianca au Pays des kangourous, les Studios Disney étaient persuadés que le public se déplacerait en masse pour voir La Belle et la Bête les gens ayant retrouvé l'envie de voir des adaptations de contes depuis la sortie de La Petite Sirène.

Et ils eurent totalement raison.

Le film eut tellement de succès que le Second Âge d'Or se poursuivit.

En effet, La Belle et la Bête fut le premier film d'animation à oscars multiples. Néanmoins, il ne récolta pas celui du meilleur film car il était (et est encore) mal vu de décerner un oscar du meilleur film à un film d'animation car "trop puéril, trop infantile".

Et pourtant, La Belle et la Bête est une histoire d'amour bien plus travaillée et intéressante que la plupart des comédies romantiques et pseudos-drames romantiques pour quiches.

Oubliez les gens disant que le film raconte une romance basée sur le Syndrome de Stockholm ou encore ceux disant que l'histoire d'amour du film est une romance toxique et écoutez ceux qui ont vraiment compris La Belle et la Bête.

La première bonne chose de ce film est la suivante: avant la sortie de ce film, les Princes n'étaient pas de vrais personnages se limitant à être des trophées pour les Princesses voire des potiches en détresse que doivent sauver les Princesses.

_(oui Eric, c'est de toi que je parle)_

Or, dans La Belle et la Bête, le Prince a une vraie personnalité au point de partager la vedette avec la Princesse. De plus, comme le titre l'indique, le Prince en question n'est pas beau gosse.

Et en dehors du fait qu'il se fasse appeler la Bête, ce nouveau Prince a un background.

Alors qu'il n'était qu'un enfant (chose suggérée par un dialogue au cours du film), le personnage a été enlaidi et isolé par une méchante Enchanteresse déguisée en vieille mendiante qu'il a jugé sur son apparence comme le ferait un enfant apeuré face à ce qu'il ne connaît et ne comprends pas et non pas par cruauté gratuite.

À cause de sa laideur et son enfermement à la fois dans son château et sur lui-même, il est LOIN de pouvoir montrer ses bons côtés car subissant une punition injuste. Ce qu'il doit apprendre pour changer dans le bon sens, c'est l'humilité. Ainsi, avec Belle le poussant à faire face à ses défauts, il pourra apprendre à se respecter et également respecter les autres.

Avec tout ceci, la Bête est probablement l'un des personnages les plus complexes que Disney ait créé.

En ce qui concerne Belle elle-même, c'est également une héroïne plus intéressante que ses prédécesseuses. En effet, contrairement à d'autres Princesses, elle ne rêve pas d'une romance. Cette dernière arrive par hasard et non pas parce qu'elle la cherche. Mais ce qui rend démarque Belle d'autres Princesses Disney, c'est, qu'en dehors du fait qu'elle ne rêve pas d'amour, elle est rejetée des autres parce qu'elle a son monde à elle ainsi qu'à cause de sa passion pour la lecture. De ce fait, elle a besoin d'un environnement qui la comprenne.

Pour mieux parler de ceci, voici les propos de Mayo-Lek au sujet de Belle

C'est quelqu'un qui a déjà la passion pour ce qu'elle veut. Elle sait juger les choses sans s'appuyer sur leurs apparences de départ que ce soit un livre ou une personne. Elle fait toujours preuve de la bonne mentalité dans les situations qui la touchent même s'il lui arrive d'être débordée par la situation et ça la démarque de pas mal de héros ou d'héroïnes typiques. Très souvent, un héros doit apprendre à évoluer soit pour corriger ses erreurs, soit pour affirmer ses qualités. Mais Belle n'a pas à évoluer, c'est le monde autour d'elle qui le doit[...]Le cadre de départ [du] village mets en place une aliénation forte chez elle car elle ne correspond pas à la norme qu'on se fixe. Et toutes les péripéties et développements qu'elle vivra les mèneront à se trouver une situation qui lui conviendra mieux[...]Elle doit juste rester fidèle à qui elle est malgré tout ce qui lui arrive.

Ainsi, au fil de l'histoire, les apparences des personnages deviennent accessoires le film préférant davantage développer leurs personnalités respectives (la Bête capable de s'ouvrir aux autres malgré son enfermement, la Belle intelligente et gentille mais n'acceptant pas qu'on la sermonne et sachant défendre ses points de vue...). On s'éloigne ainsi des romances Disney s'étant souvent basées sur "l'amour au premier regard" pour nous montrer une romance plus réaliste avec des personnages devant apprendre se connaître pour s'aimer. Autrement dit, ils se découvrent mutuellement en tant que personnes et ne parlent jamais de leurs apparences entre eux contrairement à d'autres Classiques Disney insistant fortement sur la beauté des Princesses Disney précédentes.

-Qui aurait cru ça d'un film dans lequel l'héroïne s'appelle Belle?_

Cela est encore plus appuyé par le fait que le seul personnage du film insistant sur la beauté de Belle est un méchant: à savoir le frimeur et narcissique Gaston.

Alors qu'au premier abord, on aurait pu penser que Gaston est juste un kéké relou, celui-ci devient de plus en plus dangereux au fil du film.

Comme le dit si bien le film lui-même

Le plus fort, c'est Gaston!

Ce méchant est un véritable détournement de Prince Charmant puisque c'est un bellâtre idiot, arrogant, pervers et sans remord ne cherchant pas "l'amour" de la Princesse mais une épouse-objet digne de lui parce qu'aussi belle que lui.

De plus, c'est un horrible misogyne comme le montre cette réplique

Les femmes ne sont pas faites pour lire. Dès qu'elles ont des idées dans la tête: c'est l'horreur.

À travers cette réplique, on voit une autre raillerie envers les Princes de Blanche-Neige, Cendrillon ou encore le Prince d'Aurore, Philippe, tombant amoureux des Princesses uniquement parce qu'elles sont belles (et, parfois, chantent bien) et non pas pour leurs personnalités.

On voit ici un gros contraste entre Gaston et la Bête entre le premier étant "amoureux" de Belle pour sa beauté et qu'il veut ce qu'elle soit et la Bête s'éprenant de Belle pour ce qu'elle est...

...au point que lorsqu'il a comprit qu'elle aime lire, il lui offre une bibliothèque.

Autre contraste: lorsque la Belle s'inquiète pour son père, la Bête la laisse partir pour le bien de la Princesse et son parent alors que Gaston, au contraire, fait du chantage à Belle en exigeant qu'elle l'épouse sous peine de faire interner son père. Sans compter le fait qu'il tente de tuer la Bête en hurlant "BELLE EST À MOI!"

Belle elle-même est parfaitement conscience de tout ceci car lorsque l'odieux garçon traite la Bête de monstre, elle réplique.

Ce n'est pas lui le monstre Gaston. C'est toi!

Question qui sera davantage exploitée quelques années plus tard avec Le Bossu de Notre-Dame et sa célèbre question

L'homme est-il un monstre ou le monstre un homme?

Mais revenons à La Belle et la Bête. En dehors des héros et du méchant, les autres personnages sont également charismatiques.

Le chandelier Lumière et l'horloge Big Ben (subtil!) sont un excellent duos comiques. Les interactions entre le chandelier bon-vivant généreux et l'homme-horloge raisonnable, et un peu lâche sont juste hilarantes.

On peut, toutefois, reprocher au film de faire de Lumière une caricature de "français" pas flatteuse mais ce serait oublier que c'est typique des américains de se moquer de nous dans leurs films.

L'Armoire et madame Samovar sont de touchantes figures maternelles, Zip est un sympathique enfant mignon.

Mais le personnage se démarquant le plus parmi les gentils secondaires est Maurice, le père de Belle. Loin du père autoritaire, surprotecteur et, paradoxalement, distant d'Ariel, Maurice est un père aimant, doux ayant une touchante complicité avec sa fille...

...et va même jusqu'à tenter de la sauver lorsqu'elle se mets en danger en risquant jusqu'à sa vie pour ça.

De plus, le fait que Maurice soit un inventeur un peu fêlé peut le rendre drôle.

En ce qui concerne les méchants secondaires, ils sont surtout limités à de la figuration. Néanmoins, LeFou, le sidekick de Gaston, est très drôle et forme une bonne dynamique comique avec ce dernier dans beaucoup de scènes.

Et n'oublions le directeur de l'asile qui, s'il apparaît peu, est jouissivement cruel dans ses scènes.

Mais ce qui rend le film mémorable, ce sont ses chansons.

Après La Petite Sirène, Alan Menken revient pour nous composer une BO instrumentale et chantée devenue culte au point que La Belle et la Bête a remporté l'Oscar de la meilleure chanson (ceci dit pas pour la meilleure du film).

La meilleure de toutes est, sans le moindre doute, Tuons la Bête, l'une des chansons de méchant la plus culte jamais composée.

-désolée Gaston mais tu n'as pas le je-ne-sais-quoi faisant que je peux te considérer comme culte_

Puisqu'on parle de chansons, parlons de voix: le doublage du film est vraiment réussi.

En effet, la distribution des rôles est juste superbe

-Bénédicte Lécroart en Belle

-Emmanuel Jacomy en Bête (ayant interprété Jaq dans le deuxième doublage de Cendrillon)

-François Le Roux en Gaston (le meilleur comme il le dit lui-même)

-Daniel Beretta en Lumière

-Jean Amadou en narrateur (dans le prologue)

-Georges Berthomieu en Big Ben

-Lucie Dolène en madame Samovar (qui interprétait Blanche-Neige dans le doublage de 1962)

-Clarence Le Prévost en Zip

-Georges Aubert en Maurice

-Jean-Claude Corbel en LeFou

-Claude Chantal en Armoire (ayant interprété la Marraine-Fée dans le deuxième doublage de Cendrillon ou encore Anita dans Les 101 dalmatiens)

-Jacques Giraud en Fourneau

-René Morard en libraire

-Henry Djanik en monsieur d'Arque

-Josiane Pinson en Plumette

Néanmoins, malgré toutes ses qualités, La Belle et la Bête n'est pas parfait.

En effet, à travers un village avec des habitants modestes peu intelligentes rejetant Belle parce qu'elle aime lire et le château immense d'un Prince où Belle peut lire autant de livres qu'elle veut grâce à la présence d'une bibliothèque, on sent un mépris de classe dont on aurait pu se passer.

La mort de Gaston, si elle n'est pas ridicule, n'est pas réellement marquante et/ou mémorable. Dommage pour un méchant aussi réussi.

Quant la Bête redevient un "beau" Prince, sa forme finale ressemble davantage au Prince de LU qu'à un véritable Prince Disney

https://youtu.be/I_ihIykm_WI?t=87

De plus, le film ne s'attarde pas assez sur son épilogue trop court et préférant se centrer sur les personnages secondaires que sur les héros devenant des figurants dans les dernières minutes de l'histoire.

Bref, La Belle et la Bête est un très bon film et, également, une romance bien mieux écrite que celles de nombreux films d'amour tout juste bon à être des pseudo-comédies romantiques niaises et vides d'intérêt et/ou des soi-disant drames romantiques aux enjeux inexistants.

Et le fait qu'un film destiné au jeune public se montre plus intelligent que la plupart des films d'amour soi-disant plus adultes niveau romance a de quoi faire réfléchir.

Créée

le 20 févr. 2024

Modifiée

le 21 févr. 2024

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