L'une des particularités sidérantes de la grande animation du 20ème siècle, et plus particulièrement l'animation de bêtes, c'est cette capacité à allier l'exagération cartoonesque avec le soucis du détail d'observation, cette aptitude à valser entre le trait doux d'un anthropomorphisme finement étudié et la puissance acérée d'une rigueur quasi naturaliste.

Une autre de ces particularités est de brasser dans ses déliés une multitude d'inspirations artistiques qui, bien loin d'une prétention de reconnaissance en la matière, s'offre au public dans son plus simple élément : Une suite d'images qui bougent. Un dessin animé. Cet objet est alors conçu par le panthéon des gens qui savent comme un rejeton commercial, vaguelette d'un empire tempétueux et vorace déchaîné. C'est pourtant bien l'impression d'une oeuvre d'art que peuvent laisser certains de ces films aujourd'hui. Une oeuvre d'art dans son plus simple et perspicace élément.


La Belle et le Clochard exploite ces deux points à la perfection, jonglant entre comique burlesque, comédie romantique tout en finesse et oeuvre noire, expressionniste, lourde de teintes d'encre et de charbon. Les scènes s'enchaînent dans les cavalcades et les hurlements de toutes sortes, aboiements, miaulements, grognements, braillements et cris stridents, et offrent quelques uns des plus marquants instants de l'Histoire animée.

Jamais chats ne seront ainsi griffonnés dans toute leur sinuosité vicieuse, jaillissant de leur panier comme des serpents possédés, grâce féline et danse venimeuse.
Jamais chiens ne retrouveront cette justesse à l'écran, cavaleurs fous, fourrures charmeuses, guerriers valeureux et patibulaires osseux et décharnés drapés dans leurs bures de peau.
Rarement castor ne sera si hilarant dans sa monomanie.
Rarement rat si effrayant, insidieuse créature entraperçue dans un recoin de ténèbres.

A ce titre, le face à face du Clochard et du rat sur un fond d'encre et d'éclairs reste anthologique, duel en clair obscur entre cerbère protecteur, tout en crocs apparents et démon d'outre-tombe, les yeux luisant dans la nuit.

Le film, mené par la crème de l'équipe de cet âge déjà ancien, explose par étincelles d'une inspiration inégalée pour la mise en scène du trait et du pictural, de la sensibilité et de l'observation, le mignon succédant au frisson sans la moindre fausse note. Une des meilleures comédie romantiques de tous les temps, abordant une multitude de thèmes avec tact et pertinence.
Le propre de la grande animation du 20ème siècle : Indémodable.

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le 14 sept. 2014

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zombiraptor

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