Miroir de ces propres démons
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Nous sommes en Afghanistan en 1981. La guerre fait rage entre les Russes et les Moudjahidines. Dans ces contrées isolées et désertiques, il n'y a pas de place pour la pitié. Le film s'ouvre sur le massacre et la destruction d'un village par des tanks soviétiques. Les maisons sont détruites, les villageois massacrés, les animaux abattus, le puits empoisonné, les résistants torturés. Nous voilà plongés dans l'horreur de la guerre, celle qui prend aux tripes, barbare et inhumaine. Film de guerre atypique, "La Bête de Guerre" nous fait suivre un tank russe qui s'est perdu de son escouade et qui erre dans le désert, son fuel et son huile fuitant, poursuivi par un groupe de Moudjahidines qui clament vengeance. L'originalité du film vient avant tout qu'il est américain et qu'il ne met pas en scène la bravoure de son pays. Au contraire il s'attarde sur deux camps que tout oppose (si ce n'est une ferme croyance en Allah pour les uns et en le communisme pour les autres) et qui sont tous deux composés de salauds et gens biens. Parmi les Moudjahidines, il y a les braves qui veulent se battre avec honneur et il y a ceux qui détroussent les cadavres et qui tuent gratuitement. Parmi les soldats composant le tank égaré dans le désert, il y a les intellectuels et les brutes, le sergent commandant le tank s'avérant être un véritable salaud n'hésitant pas à fusiller ou à abandonner ses hommes quand bon lui semble, croyant fermement pouvoir tout accomplir avec son char. Ce qui frappe surtout dans "La Bête de Guerre", c'est qu'il évite le manichéisme. Des salauds il y en partout. Le film dénonce cette violence absurde et barbare avec virulence et raconte l'histoire d'une traque, d'un affrontement digne de David contre Goliath. Il bénéficie surtout d'une ambiance incroyablement pesante que Kevin Reynolds distille sans peine, aidé par les paysages magnifiques écrasés par le soleil. Chaque plan est d'un esthétisme soigné et renforce la puissance d'un scénario qui ne cesse de nous surprendre sans se censurer. Dans certaines scènes, on n'est pas loin d'une imagerie fantasmagorique (le tank brûlant tout autour de lui en pleine nuit), presque hallucinatoire. Reynolds, à travers sa mise en scène, raconte bien l'épuisement de ses personnages, écrasés aussi bien par la chaleur du désert que par cette violence qui horrifie ou qui finit par rendre complètement insensible. Souligné par la composition musicale de Mark Isham et par des interprétations à fleur de peau (Jason Patric et George Dzundza en tête), "La Bête de Guerre" est de ces films inoubliables et traumatisants qui hantent nos nuits et qui laissent dans notre imaginaire de cinéphile des images marquées à vie. La photographie est splendide, la violence affreuse, l'idéologie stupide, le film désormais incontournable.
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le 7 mars 2016
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