Une immersion très réussie dans la vie des petites villes de province, ses hôtels vieillots, ses pharmacies, les rues où chacun peut être reconnu. Une ambiance qui rappelle un peu, en plus du fond de l'histoire, celle du "Septième juré" avec Bernard Blier dans le rôle d'un pharmacien respecté et insoupçonnable (G. Lautner, 1962).
Le tout est servi par une photographie impeccable, quoiqu'un peu froide par moments. La procédure pénale est brillamment dépeinte dans toute sa froideur, avec de longues minutes d'audition. Cependant, au fil de l'avancée de l'enquête, j'ai l'impression grandissante d'un Mathieu Amalric (comme réalisateur) qui prend de plus en plus de hauteur sur le déroulement de l'histoire, tellement de hauteur qu'il finirait presque par faire de l'esthétisme le moteur du dernier quart d'heure : au moment du procès, la musique couvre des dialogues eux-mêmes recouverts les uns les autres par des fondus sonores. Cette fin m'a laissé une impression de frustration, je n'ai pas bien compris où a voulu en venir le réalisateur. Une charge contre la justice ? La vie provinciale et ses commérages ? Les conventions sociales qui, d'avance, condamnent les amoureux adultérins ? A force de prendre trop de hauteur, je crois que l'oeuvre finit par survoler le sujet qu'elle voulait traiter.