La Chambre bleue par Sophia
Vu dans de mauvaises conditions car le projecteur manquait de rouge, la Chambre Bleue m'a néanmoins parue sublime. Ce film tiré d'un roman de Simenon porte la pudeur de son auteur, la justesse de son réalisateur, et un ton unique, un regard différent. S'oppose le foyer fade, rongé par la culpabilité de l'époux adultère et la chambre bleue respirant d'une sensualité étouffante, agonisante tant elle est pleine de vie, qu'on sent sur le point de cesser d'exister et pourtant qui semble être le seul endroit réellement important. Tout est dit sur le bout des lèvres à l'intérieur, murmuré, comme un secret. C'est dans cette chambre que se trame le drame sur le point d'éclore mais nous spectateur somme témoin d'un procès sans coupable ni cadavre, et l'on se demande si le crime n'est pas simplement l'adultère. Se révélant au fur et à mesure, comme une fleur sur le point d'éclore, mais une fleur empoissonné, on va de souvenir en souvenir, de plus en plus vite, avec de moins en moins de sentiment de s'y reconnaître, on a le vertige comme le héros, qui ne sait plus, qui ne vit plus, perdu, pâle, mortifié, l'abomination a eu lieu, mais laquelle, on l'ignore. On finit par l’apercevoir, sur des clichés, tenus par un juge qui apparaît en premier lieu comme un bourreau et en second comme un homme précis, humain, attentionné, prouesse d'acteur, mais n'y en a-t-il pas aussi dans le jeu de la maîtresse, l'amoureuse transie, l'innocente attendrie, celle qui aime à jamais, quelqu'en soit le prix, qui ne semble n'avoir sa place dans cette réalité trop terne pour elle. On comprend alors, l'histoire des amants maudis, et la sorcière qui scelle leur destin apparaît en filigrane, indice lâché à demi mot, un plan qui nous semble énigmatique jusqu'à la résolution finale, qui n'apparaît pas au héros qui oubli, qui ne sait plus, perdu, il accepte la sentence, mais au fond, il n'est déjà plus là.