La Charge des Tuniques bleues (au titre bien trop ronflant) est un western assez curieux et assez inhabituel par son héros, Jed Cooper, un homme des bois assez fruste et non-conformiste qui fait griller ses truites dans le bureau d'un officier, c'est un trappeur épris de liberté et de nature qui arrivera à se civiliser au contact de l'uniforme ; en plus, il tient l'armée pour responsable de son infortune et de l'hostilité des Indiens. Ce rôle sied parfaitement à Victor Mature qui pouvait montrer autre chose que ses emplois de colosse de péplums bibliques, grâce à son visage buriné et sa haute stature. Acteur souvent méprisé pour ce type de rôles antiques, j'ai déjà dit du bien de lui dans ma critique de la Poursuite infernale, car on le confinait dans un emploi stéréotypé alors que son registre était bien plus large.
C'est une intrigue intéressante, aux tendances écologiques, et on sent que Anthony Mann s'amuse à intégrer ce héros atypique à une histoire purement classique de conflit entre Indiens et Tuniques bleues. Pourtant, il a confié qu'il n'aimait pas ce film, car il n'a pas eu toute la liberté voulue à cause de l'implication de trop de personnes sur ce projet, la Columbia lui a notamment imposé un happy end qui n'était pas prévu, d'où un côté par endroits fébrile ou confus. Ceci dit, c'est quand même Anthony Mann derrière la caméra, un des plus grands spécialistes du western, et même si ce n'est pas un de ses grands chefs-d'oeuvre, c'est du bon matériel, sur la base d'un excellent scénario de Philip Yordan, et où l'on reconnait la propension de Mann à filmer la nature. L'aventure est caracolante, les scènes d'action bien réglées, et le casting entourant Victor Mature est de belle tenue, avec le toujours sympathique James Whitmore, Robert Preston en fringant officier, Guy Madison, Anne Bancroft alors toute jeunette, et un certain Guy Williams qui deviendra peu après le très classe Don Diego de La Vega dans la série légendaire Zorro de Walt Disney.
On peut reprocher à Mann d'avoir délaissé toutes les autres intrigues au profit de l'intrigue amoureuse, au mépris des règles propres au western, c'est l'élément le plus surprenant de ce film, mais il ne faut pas bouder son plaisir, ça n'en reste pas moins un western solide et bien réalisé qui divertit agréablement, loin de toute sur-westernisation artificielle.

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le 21 oct. 2019

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