The Hunt fait partie de ces films remarquablement joués. Simplicité de la mise en scène, beauté de l'image, acteurs très convaincants. Mais ce film est plus qu'une histoire d'injustice, car j'ai vu certaines critiques le réduire à ça. Il ne faut pas se contenter de voir ce petit monde social si facilement cruel lorsque la sacralisation de l'enfant s'en retrouve ébranlée. Lukas devient naturellement un paria, coincé dans l'engrenage sans limite de la rumeur. Mais au-delà des humiliations, ce film est porteur d'une symbolique très forte sur l'homme.
La chasse au daim, présentée comme un passage symbolique à l'âge d'homme - on est virils, on s'enivre, on mange du gibier qu'on a tué soi-même, montre les aspects patriarcaux qui pèse sur les épaules des personnages. Que ce soit Théo, torturé entre le rôle du père protecteur, du mâle qui doit agir en tant que tel, ou les autres se transformant en molosses à la sainteté irréprochable, il n'y a que peu de place pour la réflexion. Les femmes sont assez effacées, laissant aux hommes défendre la bonne cause et punir le mal.
Dès le début, Lukas, instituteur, semble se détacher d'eux, tout en faisant partie de la meute : un peu réservé, un peu maladroit, un peu sensible, peut-être, suffisamment pour enfermer des choses. Mais quelles choses ? Il suffit d'un mensonge, un petit mensonge, pour que cet homme un peu à part prenne le visage de la monstruosité.
L'ouverture du film présente une scène de chasse, où Lukas tue, dans un silence presque sacré, le gibier du soir ; silence qui s'oppose aux brouhaha des mâles festoyant dans la bonne chair. Homo homini lupus est ; ce leitmotiv est illustré avec force tout au long du film, dans une finesse d'interprétation indéniable. C'est la question de l'homme, de son rapport à l'animal, qu'il domine, mais les hommes n'ont-ils pas tous un peu une part de bête ? Quoiqu'il en soit, The Hunt, c'est aussi un traumatisme, celui de l'homme pris en joue - et qui restera marqué, profondément.