En adaptant la pièce "Les Sorcières de Salem" d'Arthur Miller, le réalisateur de La Folie du Roi George nous transporte dans l'Amérique de la fin du XVIIe siècle, à une époque dépourvue de gouvernement et où la parole de Dieu transmise depuis ses mandataires catholiques était irrémédiable. Une époque sombre où a eu lieu l'un des plus incroyables procès de tous les temps, celui de la jeune Abigail Williams et d'autres filles de Salem, considérées comme des sorcières mais qui vont peu à peu retourner les accusateurs les uns envers les autres...
Sans vraiment prendre un réel parti ni tenter d'en expliquer les véritables raisons, Arthur Miller parvient à montrer la réalité et l'envergure d'un tel drame historique en prenant d'immenses précautions quant à la véracité des faits. Haine, pitié et compassion vont tour à tour s'emparer de nous à la vue des innombrables vérités que vont progressivement déblatérer les accusées pour sauver leur peau d'un châtiment plus mortel que divin, pointant pour cela du doigt tous ceux et celles qui leur ont jadis fait du tort. Parmi eux, le fermier John Proctor qui va se démener comme un diable pour faire entendre raison aux Révérends improvisés juges de la bêtise que sont les propos des jeunes filles.
Durant presque deux heures, le spectateur est happé par une succession d'affabulations et d'incohérences lancées comme de vulgaires crachats par des gamines mythomanes, transformant leur village en un véritable enfer où la confiance et le bon sens ne sont plus, profitant d'une époque terrible où nulle preuve ne suffisait pour démentir quelque chose et où il suffisait d'une bonne répartie pour condamner une personne. C'est ainsi à travers ce spectacle aussi désolant que passionnant que le réalisateur nous guide avec un suspense haletant, spectacle porté par un casting haut de gamme (Daniel Day-Lewis, Winona Ryder, Paul Scofield, Joan Allen, Bruce Davison et j'en passe), pour un long-métrage historiquement intéressant faisant intégralement partie de la culture américaine.