Les premières minutes de ce film m'ont fait peur : une narration à la troisième personne, le producteur maître du film, Dieu de la ville cinématographiée, nous raconte New York. J'avais peur que cette suite de plans n'ait pas de sens, que ça continue comme ça pendant une heure trente. Puis, fort heureusement, il décide de fourrer son nez dans une histoire. Et là ça démarre vraiment. Et là je suis rassuré.

The Naked City est un polar bien construit. L'enquête avance à petits pas ; évidemment, il faut bien s'octroyer quelques facilités quand on veut servir une enquête comme trame principale, alors voilà, le lutteur, il joue de l'harmonica. Mais à part ça, tout semble logique, cohérent.
Les inserts sociologiques sont intéressants : d'une part ça permet d'aborder la ville, le contexte temporel de l'histoire, de maintenir l'illusion sur le rêve américain aussi, malgré cette affaire sordide qui ne comporte finalement aucun innocent, et d'autre part, ce la permet de faire respirer le récit. Car l'enquête, elle avance vite et bien, le cut est incisif, Jules Dassin ne se permet pas beaucoup de digression, il va droit au but. La ville, donc, permet au spectateur de souffler autant que les enquêteurs lorsqu'ils rentrent chez eux.
D'ailleurs, la scène finale, plus axée sur l'action est une délivrance après une si longue enquête ; pendant 1h20 le spectateur réfléchit ou plutôt prend des notes de la leçon faite par l'inspecteur, et ces dix dernières minutes sont un véritable cadeau, un peu comme quand on pose minutieusement ses dominos pendant une demie journée et qu'on peut enfin bousculer la première pièce.
Enfin, 'humour est un atout majeur à ce film. J'aime bien les polars, mais souvent les auteurs dépeignent un monde glauque où l'on se torche la raie des fesses avec le rire. Fort heureusement, il n'en va pas de même dans ce film où l'enquêteur a toujours le mot pour rire. Certaines situations sont également un brin cocasses.

Visuellement, il y a de très beaux plans, des plans aux compositions bien équilibrées, parfois géométriques. Malheureusement je suis déçu du contraste assez peu marqué ; en effet, pour un polar, j'aurais aimé des noirs plus tranchants, ici il y a trop de valeurs de gris à peine nuancées. Les acteurs sont bons, et comme le dit le producteur/narrateur, c'est pas plus mal d'avoir des têtes moins connues en plus de jouer hors studio. En plus, Jules a plutôt bon goût et nous offre de jolies demoiselles dans les rôles féminins principaux.
La BO est assez traditionnelle pour l'époque, mais notons que Jules l'utilise avec intelligence, sachant la couper dans des moments dramatiques (plutôt que de la mettre plus forte dans ces mêmes moments).

Bref, The Naked City est doté d'un scénario terriblement efficace ; mon seul regret est que ce ne soit pas plus percutant visuellement (malgré quelques très bons plans et une très bonne utilisation de la caméra).
Fatpooper
9
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le 13 févr. 2013

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Fatpooper

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