Fait rarissime: un cinéaste s'est joint au publicitaire pour nous promettre un film que nous ne verrons jamais. Que le distributeur nous serve un hypothétique meilleur film de Vinterberg depuis 20 ans, c'est déjà discutable. C'est de bonne guerre, il est dans son rôle. Mais que le cinéaste se trompe à ce point sur le titre de son film, voilà quelque chose qui n'est pas commun.


Un manque certain de maitrise marque d'ailleurs l'ensemble de la production, qui pourrait être -et c'est là la seule cohérence possible entre le thème supposé du film et son résultat- le produit d'un travail d'une trop grande communauté d'intervenants. Un détail est peut-être symptomatique de l'à-peu-près ambiant: lorsque l'on retrouve une rue de Copenhague sensément quelques semaines après la première fois où nous l'avions vu, les deux combis Volkswagen sont garé exactement au même endroit. Vous l'admettrez, ça fait tâche.


Et donc nous voilà embarqués pendant un premier tiers de film dans ce qui est annoncé comme son sujet, la constitution d'une communauté. Sans être fantastique, cette entrée en matière ressemble à la promesse tout à fait agréable d'un programme à venir savoureux. Les fils narratifs sont potentiellement fort nombreux, le potentiel est prometteur, surtout quand on connait le capitaine à la barre.


Que tout ceci soit balayé au bout d'un moment par quelque chose de tout à fait différent n'est pas tant un problème en soit. Dans des genres tout à fait différents, une nuit en enfer ou plus récemment Bone Tomahawk nous ont prouvé que le virage à 90°, quand il négocié avec talent, peut être parfaitement jouissif. En se focalisant sur un triste couple à trois, Vinterberg étouffe l'esprit même de son métrage, d'autant que la progression de cet arc dramatique manque totalement d'imagination et d'intensité, entre des personnages plus pathétiques -et parfois antipathiques- les uns que les autres.


Bien trop tard, quand le cinéaste essaie de se rattraper aux branches et recentrer son récit sur ce qu'il n'aurait jamais dû perdre de vue, le télescopage entre les deux univers, à force de ne pas donner d'épaisseur aux membres de la communauté, donne quelque chose de presque malsain, notamment quand


Erik pleure le départ de celle qu'il a contribué à mettre dehors (par un manque de considération total et absolu) alors que les autres -soudain étrangement concernés- font le deuil d'un enfant perdu, dans des conditions scénaristiques d'ailleurs discutables.


Comme on est pas rancuniers, on veut bien que Thomas Vinterberg recommence son film en conservant acteurs et décors. On est sûrs qu'il pourra pas gâcher deux fois un tel potentiel de départ.

guyness

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