Belle et jeune pour toujours, mais à quel prix ?
Bon nombre de film d'époque tente d'être représentatifs sans réellement y parvenir. Mis à part quelques bonnes trouvailles comme "The Duchess" qui dépeignait avec subtilité la place de la femme au XVII ème siècle, "Barry Lyndon" et son ascension des rangs dans l’Élite, "Agora" et sa dénonciation du fanatisme religieux, et n'oublions pas non plus l'excellent "Marie-Antoinette" qui parlait avec brio des convenances et des usages. "La Comtesse", petit film à part qui n'a pas fait de bruit peut lui aussi se vanter de se vouloir représentatif et de réussir à l'être.
Ce qui fait indéniablement la grande qualité de "La Comtesse", c'est qu'il s'appuie sur une histoire devenue légende et donc modifiée au fil du temps, de plus il se sert de cette base là pour étoffer son récit et mettre en avant son propos.
Dépeindre la femme à une époque ou elle ne signifie pas grand chose n'est pas une mince affaire, dans le film Julie Delpy met l'accent dans la réalisation à parler de la guerre omniprésente, sans qu'on la voit réellement car le film se centre sur le personnage central d'Erzsébet. Et d'ailleurs Erzsébet, personnage incroyable pour lequel on finira par éprouver une sorte de compassion malgré la cruauté de ses actes. Une femme forte qui fait face à ses problèmes, mais là où Julie Delpy est intelligente c'est qu'elle utilise ce personnage pour parler d'une chose forte et à mon sens essentielle lorsque l'on parle de la femme à cet époque là : L'apparence. En effet l'apparence est primordiale, la femme n'étant pas écoutée par l'homme qui la juge trop insignifiante, doit sans cesse rester visible, et donc attrayante, attirante, autrement dit jeune et belle.
Le scénario utilise cette solide base pour parler de la femme, mais aussi bien entendu pour dépeindre un portrait parfois un peu trop romancé de la Comtesse de Bathory.
Pour se donner une idée du personnage, Bathory est un peu une sorte de Dracula au féminin, une femme qui voit sa jeunesse s'envoler, va se mettre en tête que le sang des jeunes vierges pourra lui rendre sa jeunesse perdue. Cet aspect de la légende est bien vrai, d'ailleurs aujourd'hui la Comtesse de Bathory est encore considérée comme l'une des premières tueuses en série de l'histoire, et les meurtres sont d'ailleurs répertoriés. Julie Delpy incarne avec convictions la comtesse et sa cruauté sanguinaire, mais elle sait aussi lui donner une once de fragilité, et propose une facette sensible de ce personnage. Ce n'est pas forcément authentique, mais c'est néanmoins très convaincant à l'écran.
"La Comtesse" est donc l'un de ces films qui d'apparence n'a rien de bien engageant mais qui se révèle au final assez surprenant et original. Ce n'est pas un grand moment de cinéma, mais c'est du moins un film honorable pour le portrait qu'il fait de la femme, et cela sans pour autant toujours en faire des éloges.