La Comtesse par TheScreenAddict
Hongrie, XVIIème siècle. Terrifiée à l'idée de vieillir, désespérée par la mort de son époux et le départ de son amant, la Comtesse Bathory trouve le moyen (éphémère...) de rester éternellement jeune, en imprégnant sa peau flétrie du sang de vierges innocentes. Dans les alentours de son château, c'est le début d'un monstrueux carnage.
Sinistre. C'est le premier mot qui vient à l'esprit après avoir vu La Comtesse de Julie Delpy. Tout y est sinistre, des décors grisâtres filmés en clair-obscur à la psychologie des personnages, en passant par l'intrigue, d'une pesanteur de mort ahurissante. C'est très beau (à condition d'être sensible à la « beauté du mal »), les plans savamment composés ressemblent à de saisissants tableaux gothiques, la musique est tour à tour hypnotique et inquiétante, l'atmosphère est malsaine à souhait. Esthétiquement parlant, le film impressionne. C'est là sa plus grande force, mais aussi sa plus déplaisante limite.
La cinéaste / actrice principale / compositrice a tellement soigné ses images qu'elle a en quelque sorte oublié de leur donner une véritable intensité dramatique. Sans aller jusqu'à parler de coquille vide, on peut dire que l'histoire de la Comtesse sanguinaire, exploration clinique et rationnelle du mythe du vampire, ne nous touche pas vraiment. Sa froideur aristocratique vampirise tout le film, à tel point que l'intrigue laisse de marbre. Seules les exécutions rituelles parviennent à instaurer un vrai malaise. Pour le reste, le personnage de la Comtesse est tellement impénétrable qu'il finit par nous échapper totalement. Le refus systématique de tout débordement romantique finit par nous refroidir. Les ébats amoureux sont à peine suggérés, les corps ressemblent à des figures de cire pâle. Face à tant d'austérité, l'identification est impossible et l'ennui finit par s'installer.
Quelques scènes mémorables tout de même, comme une auto-mutilation filmée en gros plan, permettant à la Comtesse de garder littéralement en son sein un fragment de son amant perdu, ou le saignement méthodique d'une pauvre servante, sacrifiée pour satisfaire l'obsession monstrueuse de sa maîtresse. Un conte cruel bancal, mais d'une beauté glacée pétrifiante, qui finit par infuser un trouble diffus dans l'esprit de son spectateur.