LA CONFESSION (12,7) (Nicolas Boukhrief, FRA, 2017, 116min) :


Ce mélodrame amoureux sensible s’inscrit dans un petit village français sous l’occupation allemande pendant la seconde guerre mondiale alors qu’un séduisant prêtre vient remplacer l’ancien curé de campagne décédé.


Délaissant sa veine habituelle de polar et films d’actions sociaux, Nicolas Boukhrief découvert avec l’excellent Le Convoyeur en 2003, revient deux ans après la sortie avortée en salles du tendu Made in France (2015) avec une libre adaptation du roman Léon Morin, prêtre de Béatrix Beck publié en 1952. Une œuvre ayant déjà servie de support cinématographique avec le superbe film de Jean-Pierre Melville avec Jean-Paul Belmondo et la regrettée Emmanuelle Riva dans les deux rôles principaux. Le réalisateur évite l’écueil du remake en apportant une nouvelle version du roman notamment en situant son histoire sur la fin de la guerre et sur une période limitée à deux mois pour exacerber les sentiments.


D’emblée le parti pris du cinéaste consiste plus à dresser un portrait de femme résistante et enfermée dans ses convictions communistes que de s’attacher au nouveau prêtre du village. La narration s’introduit de nos jours de façon un peu poussiéreuse autour de la confession d’une femme âgée convoquant un homme d’église avant de passer à trépas pour lui dévoiler un secret. Une structure introductive bancale en forme de long flash-back pour apaiser son âme avant de mourir, afin de relater sa rencontre bouleversante avec un prêtre alors qu’elle était une jeune femme.


La mise en scène propre dépeint minutieusement par le biais d’une reconstitution assez convaincante (décors, costumes, ustensiles), le contexte historique de l’époque en plaçant la guerre et ses horreurs en contre champs et en quelques scènes dressent les contours psychologique un peu manichéens d’employées travaillant à la Poste. Égrenant la chef de service collabo, les jeunes femmes en manque d’homme se voyant volontiers dans les bras des soldats et l’héroïne Barny communiste anticléricale le cinéaste se sert de ses caractéristiques bien définis pour relater l’atmosphère anxiogène et soupçonneuse de l’époque ou délation, résistance et collaboration s’entremêle dans un même lieu de travail ou de façon sourde dans les rues.


Mais le principal enjeu du film se situe bien entendu dans la rencontre entre ces deux êtres de fois. Morin vouant sa vie à Dieu, et Barny disciple de Karl Marx. La confrontation d’idées donne lieu à de beaux échanges rhétoriques où chacun des deux se testent, s’apprivoisent et se troublent. Deux tourments amoureux interdits, l’un par fidélité au créateur et l’autre par fidélité à son homme en guerre dont elle espère un retour. La mise en scène contraint toujours ces deux êtres à rester dans des lieux clos (confessionnal, maison) ou dans un espace réduit (escalier, porte, meubles) condamnant leur histoire pour les vouer à leur enfermements respectifs irréversibles. La mise en image reste assez sage ne provoquant pas le trouble et la fièvre qui anime cette histoire ou l’intellectuel se mêle aux soubresauts du cœur et où l’éloquence arrive à bout de la résistance de la jeune femme tombant sous le charme divin du prêtre. Mais mise à part certains accidentels rapprochements des corps (ou parfois trop abruptes) où par un lent travelling soulignant le désir, l’émoi charnel n’est malheureusement pas assez intensément au rendez-vous. On a connu le metteur en scène plus audacieux...


Ce duel psychologique filmé avec précision où chacun des deux utilise sa linguistique, demeure néanmoins passionnant à suivre, comme une partie d’échecs où chacun avance ces arguments comme des pions avant que le curé mette en échec les barrières de la jeune Barny, séduite et bernée par le charme de ce brillant et éloquent prêtre. Une lutte de pouvoir où les dialogues s’avèrent brillants et questionnent chaque époque sur l’engagement intellectuel et les ruptures idéologiques.


Pour incarner cette confrontation modernisée le cinéaste s’appuie sur la prestation convaincante, sobre et charmeuse (un poil trop) du charismatique Romain Duris et sur la beauté classique de la tourmentée Marine Vacht (Belles famille, Jeune et jolie) enveloppée dans une lumière photographique soignée. Venez découvrir avec le cœur, cette nouvelle version honnête d’une touchante tragédie amoureuse au sein de La Confession. Académique, spirituel et délicat.

seb2046
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le 8 mars 2017

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