Nous sommes présentés à la famille Gardner, bon séjour en enfer et que la folie vous guide



  • Qu'est-ce qu'on mange ?

  • Un cassoulet !

  • Oh, non, qu'elle horreur !

  • C'est un plat traditionnel français.

  • Oui, c'est un plat de bouseux tu veux dire.

  • Jack, tu veux bien enlever le couvercle des légumes s'il te plaît.

  • Oui.

  • Je trouve que ça sent bon.

  • Normal, t'es défoncé.

  • La ferme. Oh ça va, on sait tous que tu aimerais bouffer que du fast food à tous les repas.

  • J'adore les viandes transformées.

  • Dans ce plat, il n'y a aucune viande transformée, m'a chérie. C'est un mélange de canard et de porc assaisonner d'épices régionales. Et il se trouve, que c'est le plat préféré de ta mère.




Bienvenue en enfer !



Color Out of Space écrit et réalisé par Richard Stanley est une expérience brillante, troublante, intelligente, engageante et unique, d'une adaptation, dans une mouvance à la John Carpenter, d'une nouvelle de H. P. Lovecraft : « La couleur hors de l'espace ». Une œuvre captivante qui canalise méthodiquement l'entité maléfique d'un génie du mal par le biais des mésaventures de la famille Gardner, spécialisée dans l'élevage d'alpagas, qui va vivre le pire des cauchemars après qu'une mystérieuse météorite s'écrase sur leur propriété et se mette à provoquer toutes sortes de situations terribles et difficilement descriptibles. Une histoire diabolique qui du début à la fin traite d'un sujet maladif, insidieux et contaminant qui vient altérer les facultés mentales du spectateur définitivement corrompu par l'horreur malsaine, grossière et dérangeante qui se joue. Un film en constante évolution qui sur un rythme délibérément lent (plus ou moins bien géré) durant la première moitié, va prendre son temps pour développer son récit, ses personnages, mais aussi et surtout son effroyable atmosphère. Survient la seconde moitié : un théâtre des horreurs intensifs difficilement descriptible dans lequel le surnaturel, l'effroi, le gore, le bizarre et l'indiscernable se côtoient pour un cheminement radical, dingue et viscéral. Un véritable coup de poing dans les parties sensibles clairement pas adressé à tout le monde, avec des moments très difficiles à suivre malgré le côté addictif.


De manière magistrale, le cinéaste use de tous les bons ingrédients via une projection ambitieuse à tous les niveaux qui va traiter de la peur irrationnelle à travers une atmosphère fantasmagorique qui dégouline d'une répugnance collante et contagieuse qui s'introduit par tous les spores de la peau jusqu'à contaminer et corrompre le spectacle. Un spectacle qui se transforme alors en un survival horror qui échappe à tout sens commun. Les situations invraisemblables s'enchaînent les unes après les autres dans une conduite libérée de toute retenue morale pour culminer vers un acte final totalement dérangé et pessimiste dont on ne parvient pas à détourner le regard malgré la folie ambiante. Un résultat solide que la cinématographie vient enrichir par le biais d'un esthétisme déroutant offrant une conception visuelle extrêmement troublante. Une expérience originale d'une richesse déconcertante avec un jeu de couleurs surréaliste pour un contraste hypnotique qui mêle avec curiosité l'élégance avec le grotesque sur des effets spéciaux pas toujours convaincants. En résulte une chimère faisant écho avec le récit perverti et dégénéré pour un look à part entière offrant une vision unique de l'enfer. L'environnement isolé situé dans une ferme coupée du monde termine de planter un décor de science-fiction horrifique décidément idéal, que l'on prend plaisir (malgré une certaine crainte) à explorer les mystères, sur une composition musicale atmosphérique signée Colin Stetson qui vient porter la pierre finale à l'édifice.


Le casting offre des belles performances à commencer par Nicolas Cage qui est phénoménal dans le rôle de Nathan Gardner. Un pauvre père de famille qui va tomber dans la folie absolue. Je sais qu'il est de coutume de critiquer et d'enfoncer le comédien Nicolas Cage qui depuis quelques années est tombé dans les disgrâces du direct to DVD pas toujours de qualité. Pour autant, celui-ci reste un comédien formidable, le "SEUL À CE JOUR" à proposer des performances à ce point décalées pour des films originaux et osés qui n'hésitent pas à bousculer les mœurs, comme on a déjà pu le voir avec "Mandy", "Pig", "Prisonners of the Ghostland", jusqu'à "Color Out of Space". À l'heure où le cinéma n'est plus qu'une relecture de lui-même presque incapable de proposer la moindre innovation, impossible de rester fermé au génie du comédien. Que l'on aime ou non les films qu'il propose l'enfermer dans une case "médiocrité" sans y mettre la moindre nuance n'est pas rendre justice à ses nombreuses tentatives. Nicolas Cage est dingue de génie. Joely Richardson en tant que Theresa Gardner s'en sort également très bien en tant que mère en réminiscence d'un cancer qui va connaître un sort des plus atroces. Madeleine Arthur en tant que Lavinia, la fille des Gardner, incarne avec crédibilité une adolescente totalement dépassée par les évènements. Brendan Meyer pour Benny, le fils aîné, bien qu'un peu plus en retrait fait le taf. Le jeune Julian Howard termine de compléter le tableau familial en tant Jack, le fils cadet qui va connaître un sort peu enviable. Chacun des membres de la famille est exploré via leurs problèmes, leurs émotions et leurs attentes, jusqu'à ce que la météorite arrive et bouleverse tout cela. Enfin, le comédien Elliott Knight sous les traits de Ward Phillips est convaincant. Il est le personnage par qui le film commence et se termine via un monologue.



CONCLUSION :



Color Out of Space de Richard Stanley tiré d'une nouvelle de H. P. Lovecraft dans une conduite cinématographique proche de John Carpenter, est une expérience horrifique brillante et unique. Un film qui dresse un périple cauchemardesque viscéral empreint de bizarreries et d'ignominies articulées autour d'une cinématographie saisissante que les comédiens transposent avec conviction : le génial Nicolas Cage en tête, pour un résultat psychologiquement instable, contaminant et terrifiant. Sans l'instabilité dans le rythme et l'approximation de certains effets spéciaux, ce film aurait pu être un chef-d'œuvre du genre. À défaut, il reste un excellent long-métrage.


Un incontournable, à ne pas en douter !




  • Vous avez entendu ce bruit ? On aurait dit un avion qui faisait une rupture d'anévrisme.

  • Ce n'était pas un avion.

  • C'est peut-être un débris spatial. Il y en a plein.

  • Cette odeur. C'est bizarre. Je peux encore la sentir, là, maintenant.


B_Jérémy
8
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le 1 août 2022

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