James Ivory est une fabuleuse découverte, j’ai débuté mon entrée en matière avec « Le vestige des jours », sublime fresque victorienne ou l’expression des sentiments demeure caché derrière les bonnes manières et le verbe haut. Avec « La coupe d’or », nous retrouvons cette culture du non-dit et cette honte de l’amour ressenti (vous avez dit christianisme ?)…
Derrière ce marivaudage post-victorien flanqué d’un casting aux petits oignons – Nick Nolte et Uma Thurman en tête – « La coupe d’or » nous conte l’histoire des complications sentimentales du Prince ruiné Amerigo ayant pris pour épouse Maggie, la fille d’un richissime collectionneur. Avant cela, le prince entretenait une relation secrète avec l’Américaine Charlotte Stant, amie d’enfance de Maggie. Une relation qui persistera après les mariages du Prince Amerigo et de Maggie, ainsi que celui de Charlotte et du richissime collectionneur…
On subodore durant tout le film que se cache, derrière le mariage du Prince Amerigo, un désir d’assurer avant tout sa sécurité financière, au détriment de ses sentiments réels à l’égard de Charlotte. Cette dernière, de son côté, semble épousée le père de Maggie dans le seul but de rester à proximité de son véritable amour, le prince. Malgré des alliances mariales, durant une majeure partie de cette romance, Charlotte et le Prince – à l’instar de Maggie et son père – formeront les véritables paires.
Ce que je trouve remarquable dans « La coupe d’or » est la justesse avec laquelle le propos et la thématique nous ait présenté. Loin d’une histoire de manipulation et de sécurité financière, Ivory nous conte ici un monde où les sentiments reste honteux, ou les non-dits sont une règle, même proche de l’explosion, rien ne doit venir troubler l’ordre apparent des choses. Les mensonges protègent les mensonges, tous savent qu’ils se mentent, mais ils mentent quand même. Même quand vient l’heure de régler les problèmes, ils se cherchent une explication qui n’est pas la véritable raison, afin d’agir et que tout reviennent à la normale. La honte de dire les choses, sûrement aussi, la honte du péché… La normalité se fera au grand dam du bonheur de Charlotte.
« La coupe d’or » - à l’instar du « Vestige des jours » est techniquement irréprochable, Ivory nous sert une mise en scène sobre et millimétrée, toujours visuellement sublime. Concernant la prestation des acteurs, Uma Thurman (Charlotte) porte énormément le film sur ses épaules, Jeremy Northam (prince Amerigo) manque quelque peu de charisme, mais s’en sort toutefois relativement bien. Le vrai regret reste l’invisibilité et le manque de caractérisation que subit le personnage interprété par Kate Beckinsale (Maggie), bien trop fantomatique, avec un déficit d’épaisseur flagrant, on se connaît que très peu sa personnalité, elle semble traverser l’histoire en filigrane…
On passe néanmoins un très bon moment devant « La coupe d’or », James Ivory nous décrit un monde qu’il semble beaucoup aimer, avec sa classe et ses failles, ses passions et ses ressentiments.