Tirée de la pièce d'August Strindberg, cette adaptation saisissante renoue avec l'univers et les obsessions d'Erich von Stroheim.
Certes, il n'est pas ici derrière la caméra, du moins officiellement, mais on y retrouve de nombreux éléments stylistiques de ses films des années 1919- 1928: folie, frénésie, misère affective masquée sous l'apparat...
La pièce de Strindberg est, bien entendu, transposée sous l'empire austro-hongrois, abcès de fixation de l'imaginaire stroheimien. On voudrait bien savoir ce qui s'est passé véritablement dans sa jeunesse viennoise pour qu'il fût marqué ainsi toute sa vie.
Sa femme à la ville, Denise Vernac incarne de manière très crédible Théa, l'épouse du capitaine Edgar, un commandant de garnison pénitentiaire échouée sur une île.
Cet enfermement physique n'est, du reste, que la traduction symbolique de l'enfermement psychique des personnages, qui se haïssent cordialement. Cette haine recuite est le fruit amer d'une vie de frustration et de huis- clos. L'espérance de la mort pourra t'elle libérer les êtres de cette détestation ? Bien sûr que non.
Une scène emblématique pour l'histoire du cinéma, à la fois hallucinante et hypnotique, est à voir absolument : Stroheim en uniforme impérial dansant frénétiquement au son du piano joué par Vernac.
Un incontournable absolu pour les amateurs de Stroheim.