Le temps d'une petite escale en Inde, découvrez le tragique destin de la jeune Doyamorjee, une œuvre touchante et de toute beauté.
Après avoir fait un intriguant rêve, un homme raconte que sa belle-fille, une jeune mariée, serait l'incarnation de la déesse Kali. Lorsqu'un miracle semble avoir lieu, la rumeur se répand comme une traînée de poudre et bientôt tout le pays frappera à la porte de la malheureuse.
Alors je n'ai vraiment pas l'habitude du cinéma indien, certes, « La Déesse » en fait naturellement partie, mais il s'agit surtout ici d'un film purement asiatique, à des lieux du fameux cliché de bollywood et de ses comédies musicales, il nous évoque davantage les productions qui fleurissaient à la même époque dans le reste du continent, et notamment sur l'archipel nippon. Quel bonheur de ne pas avoir une danse toutes les cinq minutes.
Peut-être ai-je eu un peu de mal au début, aussi la langue m'aurait un tantinet déstabilisée, une fois que le film entre dans le vif du sujet il se révèle tout à fait passionnant.
Clairement, il est avant tout question de religion.
Mais l'œuvre nous réalise aussi la peinture d'un peuple noyé dans un profond désespoir, terrassé par les maladies.
Doyamorjee est assise sur la terrasse, immobile comme une statue, impassible, on ne distingue pas le bout du serpent gigantesque formé par la foule de tous ces croyants en détresse, pour eux il n'y a aucune hésitation à avoir, elle a sauvé un enfant, c'est la déesse, elle en guérira d'autres.
L'évènement se produit en l'absence du mari, cet homme dont les sentiments et la sincérité crèvent l'écran, à son retour il est complètement bouleversé et conclut hâtivement que son père n'est autre qu'aliéné.
Le couple est pur et tellement touchant, les deux amants tenteront de fuir et de se libérer mais surgit le doute, la crainte, chemin rebroussé. Leur complicité et leur vie auparavant nous sont dévoilés à travers de courts flash-backs, tout allait si bien et paraissait tellement solide.
Sharmila Tagore, fascinante, ne dit pratiquement pas un mot et pourtant ses troubles, ses peurs, ses faiblesses, tout cela nous est parfaitement transmis, l'actrice dégage quelque chose de puissant parvenant à véhiculer chacune de ses émotions bien que son personnage s'efforce de ne rien laisser transparaître. Âgée de seulement 17 ans elle passe de l'enfant à la mère et même à la pieta semble-t-il lors d'un plan fatal, sublime et saisissant à la fin du film, une scène à la fois magnifique et abominable.
Ainsi esthétiquement c'est à la foi beau, sobre et très soigné, réellement à l'image du cinéma oriental des années 50.
Je regrette simplement un dénouement me paraissant trop précipité et brutal ainsi qu'un message, flou, mais un peu lourd sur le propos religieux, qui aurait tendance à mettre à l'écart tout le reste de l'œuvre.
La déesse, une première expérience dans l'univers de Satyajit Ray, magnifique et émouvante, porté par des acteurs fabuleux et une réalisation tout à fait impeccable.