Une évocation bien trop simpliste pour captiver

Philippe Faucon est un réalisateur français qui s’est fait connaître auprès du grand public en cette année 2015 par le biais de son film Fatima (sorti le 7 octobre), et qui fut notamment sélectionné au dernier Festival de Cannes lors de la catégorie Un certain regard. Mais avant cela, le cinéaste avait déjà quelques œuvres à son actif comme La Désintégration, un film présenté à la Mostra de Venise 2011 et qui peut faire écho avec les terribles événements survenus récemment sur Paris.


La Désintégration, c’est la longue descente aux enfers d’un jeune Français d’origine maghrébine qui, à cause d’un problème d’intégration, va se plonger dans un mouvement salafiste également qualifié de djihad terroriste. D’un côté, nous avons une critique de la société actuelle, qui marginalise au possible les personnes d’origines étrangères : peu appréciées, refusées d’être employées… De l’autre, celle concernant les extrémistes religieux qui réalisent des lavages de cerveaux monstres en faisant croire que c’est cette même société qui les renie alors que, finalement, ce n’est pas le cas (le personnage principal piquant une crise à Pôle Emploi alors que son conseiller veut sincèrement l’aider) au point d’en faire des kamikazes dénaturant ce pour quoi il se battent à la base. Voilà ce qu’est La Désintégration. Un film qui ne prend nullement parti. Juste une évocation d’une situation de la vie de tous les jours qui pourraient être évitée si tout le monde y mettait du sien.


Et pour cela, Philippe Faucon filme avec simplicité des séquences à la limite du documentaire, sans passer par des artifices techniques (musique, effets de mise en scène, montage travaillé…). Le suivi de l’initiation d’un jeune terroriste qui se veut réaliste au possible ne passant nullement par le sensationnalisme (l’attentat final est juste évoqué par un bruitage et une fumée en effet numérique) afin de mieux évoqué les dommages causés cette terrible désintégration (que ce soit du côté collatéral ou bien familial). Cette façon de faire aurait très bien pu s’avérer payante si le film ne pâtissait pas de certains défauts qui viennent finalement nuire à son visionnage. En effet, ce style documentaire qu’arbore le long-métrage ne se montre pas vraiment en adéquation avec le scénario en lui-même.


Pour cause, la mise en scène se révèle être bien trop sobre, bien trop classique pour ce script démonstratif. Car si l’on regarde bien le film dans son intégralité, il ne se passe pratiquement rien d’intéressant et ce malgré son sujet. Juste un enchaînement de scènes n’ayant aucun impact visuel ni émotionnel alors que des séquences chocs auraient justement été préférables. Un manque certain de puissance renforcé un rythme du récit aux abonnés absents, jonglant à la fois entre moments révélateurs servant l’intrigue principale (le personnage principal rejetant sa belle sœur par différence religieuse) et scènes complètement inutiles (le frère prenant une douche romantique avec sa compagne). Cela instaure une monotonie (pour ne pas dire ennui) assez rébarbative, risquant sans mal de désintéresser le spectateur qui peine du coup à son plonger dans l’histoire. Et c’est sans compte sur l’interprétation des acteurs, pas vraiment convaincante (notamment celle de Rashid Debbouze, le frère de Jamel), qui font oublier tout l’aspect documentaire et donc crédible de La Désintégration.


Bien qu’il s’était présenté avec un script pour le moins audacieux au point d’avoir eu du mal à trouver des producteurs pouvant financer son projet, Philippe Faucon n’a pas su traiter son sujet de manière convenable. Ses attentions étaient louables, cela va sans dire. Malheureusement, à trop jouer la carte de la simplicité et du réalisme à l’état pure, il livre un film à qui ne parvient pas à capter notre attention. Évocateur certes, mais surtout longuet et un chouïa ennuyeux.

sebastiendecocq
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le 17 nov. 2015

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