Dans son célébrissime "La Dolce Vita", Fellini s’amuse (?) de la Jet-Set romaine en déclin, illustration de la société contemporaine qui, friande de salissures, déshumanise la vie, dans sa soif inextinguible d'extravagances convenues et assez vite déprimantes. C'est dire si son propos est actuel, voir même visionnaire, à une époque où le sensationnalisme des médias semble avoir laminé toute perspective morale. Film sensuel, souvent désarçonnant, "La Dolce Vita" paraît concentrer toutes obsessions de son auteur : les doutes existentiels du journaliste Marcello Rubini, écrivain raté qui s’enlise de plus en plus dans un milieu qui dégage une forte odeur de décomposition, et ses amours dans la Rome des premières années du boom économique sont les siens (et les nôtres...). Pour filmer la réalité, Fellini en filme l’idée, le rêve, et se rapproche donc ici de Buñuel, de l’analyse des pulsions contradictoires et d'une "surréalité" qui en dit finalement plus long sur le monde dans lequel nous vivons. [Critique écrite en 1992]