Malgré les associations légères et détachées qu'évoque le titre, le Doce Vita laisse un goût amer aux spectateurs.
Cet entre-deux doux-amer est représenté par les personnages principaux du film, que l'on suit à Rome. Marcello, tout d'abord, qui ne sait se situer entre journaliste et écrivain. Maddalena, bourgeoise pleine aux as, cherchant un instant d'amour dans un quartier pauvre de Rome. Sylvia, star Suédoise, heureuse sous les projecteurs mais malheureuse sous les gifles de son homme.
Le revers de la médaille d'une vie bourgeoise et luxueuse est dépeint comme un fléau. Il peut mener à la folie ou au meurtre. Ainsi, on peut lire dans ce film la critique sociale d'une bourgeoisie décadente qui n'est pas à la hauteur de l'héritage qui est le sien, s'occupant comme elle peut avec une chasse aux fantômes dans une ancienne villa papale.
L'illusion, le paraître, est porté en filigrane par des photographes indécents. Ils exposent un thème récurrent du film : les frontières du public et du privé - ce que l'on expose et ce que l'on garde enfouit au fond de soi. Rien de plus idoine que la ville de Rome pour donner un décor à ces thèmes, avec ses rues bondées auxquelles succèdent l'intimité de ruelles.
Fellini joue avec le langage. La communication, ou son absence, ouvre et ferme le film. Elle est voulue par le casting : Anita Ekberg parle en anglais, comme certains bourgeois du film ; Anouk Aimée est doublée pour la version originale italienne ; on trouve encore une jeune femme Française du cabaret. Elle est aussi magnifiquement mise en scène lorsque Marcello et Maddalena parlent sans se voir, via un stratagème de vasque communicante, permettant une confession tragique.
Oui, la Dolce Vita comporte des scènes cultes : la scène langoureuse dans la fontaine de Trevi, ou encore la première scène du vol de l'hélicoptère, où une statue de Jésus vole sur les toits de Rome. Le film, via le personnage de Paparazzo, a même fait entrer le terme de "paparazzi" dans le langage courant.
Mais ces instants de grâce se perdent dans la longueur du film. A croire que Fellini est pris dans le même travers que ses personnages, qui ne veulent pas clore la soirée. Même si l'intention du réalisateur est de nous submerger par les aléas, les dérives et les interrogations des personnages, l'effet recherché est plus décourageant que prenant.