Un casting douze étoiles, des cadrages millimétrés, des couleurs savamment ajustées, des musiques intelligemment intégrées … des hôtels, des livres, et des costumes… Bienvenue chez Wes Anderson !
A côté de films considérés à présent comme des mastodontes, des intouchables (The Grand Budapest Hôtel et Fantastic Mr Fox en tête), The Royal Tenenbaums peut faire pâle figure. Pourtant, c’est mon préféré. Celui qui me plaît, me touche, me marque le plus.
Avec un joli titre français, « La famille Tenenbaum », on se retrouve évidemment face à un des thèmes les plus importants du cinéaste : la famille. Celle-ci trouvant sa raison d’agir ici par le biais de la figure paternelle : Royal (un prénom très commode).
A partir de là, autant dire que le génial Wes ne laisse pas le spectateur de côté un seul instant, mais le laisse prendre part à l’action et avoir sa place au sein de cette chouette tribu.
Comment ne pas aimer ces Tenenbaum, avec comme parents les merveilleux Gene Hackman et Anjelica Huston, et comme enfants les incroyables Gwyneth Paltrow, Ben Stiller, et Luke Wilson ? Leur entourage n’est pas en reste : on y trouve bien sûr l’incontournable Bill Murray, ou encore Danny Glover et Owen Wilson. Pour la touche « moins connue », il me paraît quand même impossible de ne pas citer l’amusant Kumar Pallana, qui donne lieu à certains des meilleurs gags du film.
Tout ce beau monde est réuni pour un scénario des plus prometteur :
Des années après le divorce des parents, une famille pas comme les autres se retrouve quand le père annonce sa mort imminente.
On ne s’arrête pas à aimer cette famille, mais à en apprécier chacun des membres. Comme tout bon individu aime sa parenté, Wes Anderson aime ses personnages. Il n’a pas peur d’utiliser comme il se doit un bon vieux narrateur pour nous les présenter. Il est amusant de constater à quel point il sera facile de tous les reconnaître. Les protagonistes sont presque tous en déguisements (entre le smoking pour l’un, le jogging pour l’autre, les vêtements de cowboy ou encore le manteau en fourrure) : tous sont différents, et pas un n’est de trop.
Avant même l’annonce du premier chapitre, on est déjà à fond avec les Tenenbaum.
Bonne comédie, l’humour fait mouche, à sa manière. Il s’avère tantôt noir, tantôt décalé, et tantôt des plus enfantin, mais fonctionne toujours. Nulle blague lourde ou vaseuse, mais une pointe de folie par-ci, un éclair de génie par-là. On obtient une œuvre unique et totalement en accord avec le reste de la filmographie de son réalisateur : une note de plus qui embellit l’harmonie.
Il y a en fait tout un tas de bonnes idées (dans la musique, les personnages, les plans, etc…) qui séparément restent de simples bonnes idées. Ensemble, elles procurent un assortiment de tellement de bonne volonté et de talent que ça en devient satisfaisant au plus haut point. L’univers établi est tellement proche de la réalité, tout en en étant éloigné. Cependant, il arrive à atteindre le sublime.
On voit parfois au cinéma une utilisation abusive et même vaine du ralenti. Ce n’est pas le cas ici. Au contraire ! S’il y a bien un effet dont Wes est le maître, c’est dans ce ralenti ! De même, il utilise tout aussi merveilleusement bien les flashbacks. Je me demande toujours comment cette scène sur l’ancien match de tennis (pour ne citer qu’elle) peut à ce point être émotionnelle. C’est donc simple : les choix qui sont pris sont toujours pour le meilleur. Tout est calculé. Tout s’emboîte dans une parfaite cohérence de style. C’est ce qui permet au film des petites envolées d’une beauté fulgurante.
Aussi complet que riche, triste que gai, La famille Tenenbaum est inimitable, inoubliable et donc incontournable. C’est à se demander comment Wes Anderson fait de si bons films… Mais il a bien ses petits secrets de famille. C’est ça, le plus important.