Utopia est une série britannique dantesque, qui prend une ampleur monumentale dans sa deuxième saison. La série entière n’est composée que de 12 épisodes, si vous cherchez une petite pépite pour vos prochains jours, alors foncez.
Ames sensibles, s’abstenir. La violence parsème le chemin de l’utopie, que ce soit la violence physique, morale, ou psychologique. Le mariage entre élégance et cruauté trouve ici tout son sens. Si cela ne vous effraie pas, alors tentez le coup.
La toute première séquence envoie instantanément du lourd, et démontre sans artifice de quoi sera faite la série : des personnages froids, une histoire morbide, et pourtant, un mystère immédiatement envahissant et une ambiance absolument inoubliable.
Si l’on part d’un microcosme, avec une poignée de personnages et leurs instincts naturels et leurs désirs individuels, la série n’aura de cesse que d’augmenter l’ampleur de l’histoire, arrivant jusqu’ à des complots planétaires, amenant des effets inimaginables.
Une des forces d’Utopia, au-delà même de contenir des scènes parfaites et grandioses, est de rendre n’importe quel moment jouissif ou au moins captivant. Et en cela, la bande originale est exemplaire. Elle explose au générique, décompose les personnages, dispose une tension montante : c’est grandiose. Son utilisation est tellement bonne, son écoute si agréable et frissonnante, que la première note est signe d’une véritable assurance. L’assurance d’aimer la scène qui suivra pour au moins une raison.
Les images sont également sacrément belles, surtout quand la caméra se pose dans des paysages colorés, magnifiques, mais presque factices. Au final, rien n’est concrètement beau dans la série, tout est sombre et tragique. Mais même la chose la plus affreuse peut être embellie.
Le titre l’évoque, l’utopie sera centrale. Mais jamais on ne la verra. Tout ne sera que chaos.
De l’utopie à la dystopie, il n’y a qu’un acte. L’acte n’est que la conséquence de la pensée, qui n’a peut-être pas la visée souhaitée. L’acte n’est que la cause d’une habitude, qui entraîne des conséquences incontrôlables sur soi mais surtout sur autrui.
Mais Utopia nous montre bien une chose, les actes sont incertains, soudains, et indomptables. Certaines séquences mythiques de la saison 2 confirment cela. Une séquence en particulier, en pleine nature, où les personnages sortent de nulle part, deviennent soudainement bons puis mauvais, majeurs puis mineurs, attaquants puis attaqués, menaçants puis menacés. Honnêtement, j’ai trouvé cette séquence d’une efficacité sans nom. Jamais je n’avais vu autant de retournements en si peu de temps. Et je ne parle pas de gros retournements, de cliffhangers ou quoi que ce soit, mais simplement de cette constante inversion des rôles magnifiquement mise en scène.
De plus les actes ne sont pas définitifs, car les pensées peuvent, au moindre doute, basculer du tout au tout. Cet aspect est également très bien traité, intelligemment, et assez clairement pour amener diverses surprises.
L’utopie est centrale, mais jamais on ne la voit. Mais il est possible de l’imaginer, surtout quand on sait que la série est terminée mais inachevée. A la fin de cette saison 2, quelque chose prend fin, et quelque chose commence. Il est alors possible de tout s’imaginer, et dans le cas d’Utopia, je préfère m’imaginer le pire. Si une saison 3 existait, on pourrait être sûr d’une suite pour les personnages principaux, de nouveaux rebondissements, un rapprochement de l’utopie, etc… Mais cette saison 3 n’existe pas, alors autant voir la deuxième comme ce qu’elle est au final : la dernière. Nos héros ont échoué. C’est triste, c’est froid, c’est tranchant et inacceptable, mais c’est tout à fait dans le thème de la série.
Certes, une telle fin n’est pas voulue, mais le résultat est réellement classe. Le fait d’une telle involontaire réussite, après réflexion, apporte quelque chose d’encore plus génial à la série dans sa globalité.
En douze épisodes, Utopia n’aura de cesse que de se renouveler, se perfectionner, surprendre, ébahir, et surtout, plaire à chaque instant.
Si un jour vous croisez un boiteux dans la rue qui, au lieu de vous demander l’heure, vous interroge d’un air machiavélique pour savoir où est Jessica Hyde, alors … j’aimerais vous conseiller de courir, mais soyons réaliste : si vous croisez cette personne, alors il sera trop tard. Vous pourriez survivre dans un monde parfait, mais dans un tel monde, cette personne n’existerait pas. Dès lors, et finalement dès le début, le constat se précise : l’utopie n’existe pas.