La Famille Tenenbaum est le troisième long métrage de Wes Anderson. S'il n'a pas encore la maîtrise de son style, qui éclatera à partir du Darjeeling, on fait plus que sentir ses frémissements. La narration en voix-off, les palettes de couleur et les décors millimétrés, le foisonnement des personnages. Et c'est d'ailleurs pour ce troisième point que le film est si touchant. Le scénario est linéaire, sans surprise, et sans doute même un peu plan-plan. Un bon film feel good d'un dimanche après-midi pluvieux. Avec trois enfants, comme trois morceaux du génie humain tous passés par des traumatismes différents, leur ami complémentaire qui n'aura pas moins de succès, la mère qui essaie de se retrouver entre son rôle de mère, de chercheuse et d'amoureuse, et surtout le père. Véritable pivot du film, élément aussi perturbateur que rassembleur, aussi mesquin que profond, aussi manipulateur que manipulé - par lui-même. Qui se rend compte presque par surprise, en jouant au père et au grand-père enfin parfait, qu'il aimerait continuer à être ce personnage inventé de toutes pièces par sa méchanceté originelle. Les acteurs et actrices sont tous très bons, et avec un jeu a minima propre aux films de Wes Anderson à l'exception de Ben Stiller, qui flambe comme à son habitude dans un rôle comique presque fait sur mesure, et de Gene Hackman, qui reflète à la perfection les tergiversations à peine visibles de ce père en pleine transformation.