On ne va pas encore une fois épiloguer sur le charme des films à l’ancienne. On ne va pas répéter que ça a vieillit, mais seulement que ça a été largement dépassé depuis. C’est un vieux film, et le cinéma, un art qui évolue. La technique du montré-non montré, qu’utilise Tourneur, l’effet bus qu'il a inventé, a été surexploité depuis longtemps, usé jusqu'au talon, et amené sur des hauteurs insoupçonnées, par Hitchcock notamment. Donc, pour sa culture ciné perso, La Féline peut être intéressant, mais c’est tout. Une femme obsédée par le passé, par un félin, et par un rêve récurent. Elle épouse son contraire, un homme plat et insignifiant, monsieur tout le monde, et on a le classique cliché du couple que tout oppose. Est-ce une malade, une folle, une femme qui a beaucoup d’imagination, une victime d’une malédiction, une femme-chat ? Tourneur pose son film sur un postulat de base, proche de la légende de conte de fées. Si un homme l’embrasse, cette femme va se transformer en félin. Difficile à avaler. C’est la version animalière de la belle au bois dormant. A partir de ce canevas, très peu affriolant, Tourneur axe son film sur un élément, et un seul : Comment donner les foies au spectateur, mais sans rien montrer. On est comme dans une cage. Je comprends que l’espace fermé, cloîtré du film, là pour nous serrer à la gorge, fonctionne sur les personnes impressionnables. Les contrechamps sont très suggestifs, on joue tout le temps sur l’attente. Le montage malin, (on ne voit jamais la bête), a dû faire de l’effet à l’époque. Mais de nos jours, c’est assez peu, il faut l’avouer. L’histoire d’amour est molle, les rebondissements classiques, proche du zéro suspense, la psychologie des personnages, est mince... Maîtriser le cadrage c’est bien, l’histoire étant simple et sans ambigüité, ça manque de sel, pour vraiment impressionner. D’ailleurs, il ne va pas impressionner, mais plus surprendre. Ce sera un jeu d’ombre, un montage technique, on a vite fait le tour, la forme supplante le fond. Ça reste daté, même si le film pause les jalons du film d’épouvante de base. On va dire que c’est un film d’avant-garde, vite dépassé par les évènements. On aimerait avoir peur pour les autres personnages, la maîtresse, le docteur assez entreprenant, la panthère noire qui est en cage, et que la féline adore visiter au zoo. Mais comme le mari est peu entreprenant, et la maîtresse sage comme une image, on n’aura rien. Le psychiatre ne sert pas à grand-chose, il ne se passera rien. Et la panthère c’est pire, c’est une victime expiatoire…On penserait à quelque chose de plus hard, mais non, Tourneur est peu démonstratif, plutôt suggestif, un suggestif un peu froid, pas de fantastique, pas de coup d’éclats, ou de surprises, le film fantastique version Hollywood en 1940. On finit par le classique combat final du bien contre le mal, de l’homme contre l’animal, très « théâtral », tout en hors-champ, qui gagne en ridicule, là où les autres scènes gagnaient en suggestion, en poésie. Pas vu, pas pris.
On en parle beaucoup, de ce film, mais je crois que c’est seulement pour la valeur patrimoniale, et l’immense succès en salle, (à l’époque). Jacques Tourneur, a trouvé son style de prédilection, le film fantastique.