La Pomponnette
Première observation, pour une fois Marcel Pagnol adapte une œuvre de Jean Giono et non une des siennes. Ceci dit, il se montre tellement à l’aise avec le matériau qu’il en fait un film typique de...
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le 11 sept. 2013
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- Oh Gabriel
- Quoi ?
- Dis lui toi à mon neveu, cet érudit tout droit sorti de la faculté d'Aix que la femmeu du bou -langé , elleu s'appelleu Pomponette
- Mais non elle s'appelleu pas Pomponnetteu, elle s'appelle Aurélie!
- Mais c'est pas possible ça ! Aurélie c'est un prénom d'aujourd'hui, en ce temps là, les femmeu elles s'appelaient Fanny ou bien Cosette. Et moi, la femme du boulanger, je l'ai vu tout minot en 1968 , au cinéma Le Prado
- Mais tonton, et tu l'as peut-être pas revu depuis et peut-être tu l'as un peu oublié tu crois pas ?
- Mais bien sûr Môssieur, que je l'ai revu ! Et c'est pas tes grands airs d'intellectuel qui vont me faire manger mon chapeau ! Espesse de barbeau va ! Et alors la pomponnette, c'est qui-
- Mais c'est le chat pardi !
-Le châaat ?
-Oui , Le chaaat ,peuchère, et même la chatte ! La pomponnette c'est la femelle du chat pompom, et comme une prémonition elle se carapate au début du film sûrement pour aller rejoindre un coquin dans la garrigue. Et après c'est La Aurélie qui s'escapade avec le berger du maire qui est aussi un marquis (et même c'est celui qui joue Panisse dans Marius). Parce le boulanger, lui c'est un vieux, un gras du bide, et l bagatelle aveque lui, ça doit pas être tous les soirs , et elle tu comprends, tonton, c'est une jeunette, elle a des besoins.
- Et alors, c'est pas parce qu'il est plus vieux qu'il peut pas encore lui cajoler la pachole, parce que tu crois que je m'arrange pas encore avec ta tante, même si j'ai quinze ans de plu ?
- Mais au faite, Fernand, elle est où ta femme en ce moment, elle est encore pas allé faireu les commissions du côté d'Aubagne ?
- Tu es fada Gabriel, retire-moi ça tout de suite... Et puis je te ferai dire que le boulanger là, le Raimu, moi à chaque fois que je le revois ce film, il est si triste, le bougre, qu'il me fend le cœur
-Et beh, à moi non ! C'est ce qui arrive quant tu maries une jeunette, et que tu peux pas la satisfaire, le Raimu, ton boulanger là c'est un fanfaron, un cacou, un poseur même je te ledis. Et vas-y que je t'apitoie tout le village, que je menace de plus pétrire, et pour finir que je me nasque jusqu'à m'en rendre ridicule. Moi y m'escagasse ton Raimu, et ton boulanger, y s'en va meêm insulter le bane dieu!
- Comment ça, il insulte le bane dieu ?
- C'est bien lui qui dit au curé : "Votre bon dieu, il s'en ira pas , il est cloué sur la croix, mais le le mien il est parti"
- Oh oui, mais alors excuse-moi , ton curé, l'instituteur, tout ça, dans le village ça en raconte beaucoup, mais il n'y a que le boulanger qui les intéresse, ce qu'ils veulent c'est le pain, que l'homme soit cocu, ça les fait bien rire
- Et lui, qui fait semblant de pas comprendre, il leur répond : "Cocu" est un mot pour les riches. Moi si ça m'arrivait, je ne serais pas cocu, je serais malheureux.", il est pas finaud ton boulanger. Et, puis c'est pour les anciens, ton film, les villages avec monsieur l'instituteur, le curé, le marchand de journaux, les papés assis sur la place du village qui tauqinaient le bouchon à la fraiche, ça existe plus tout ça.
- Oh, mais non Gabriel, nous les jeunes on l'aime encore ce cinéma de Pagnol, même les pitchounes, ça les fait marrer de voir la grosse bouille de Raimu quand il fait la grosse voix. Et puis moi, le voir commeu ça, triste comme les pierres se languir de sa belle, et beh ça me fout le cafard et même ça me fait chialer. Même Orson Welles a dit que Raimu était le plus grand acteur du monde.
- Oh alors si Orthon Wémachin, il le dit, on va pas le contredire, même si je sais même pas qui c'est. Mais moi ce que j'en dis c'est que les films de Pagnol, ça cause beaucoup, mais l'intrigue elle est quand même pas bien épaisse.
- Eh oui, peuchère, ça parle, ça parle, mais déjà ça fait rire les parisiens : à ma fac, y' a un drôle qui vient de Dijon, une ville juste à à côté de Paris, et c'est son film préféré ! Et puis les dialogues d'abord c'est ceux de Giono qui a écrit le bouquin, et retouchés par Pagnol c'est du bonheur en barre je te le dis. Moi les voir faire semblant de s'emboucaner pendant deux heures avec leur gouaille et les bons mots de Pagnol et Giono ça me suffit, je vois même pas passer le temps. Et y a pas que ça, c'est touchant aussi, ça fait réfléchir sur l'amour, parce que quelquefois, tu peux pardonner la tromperie quand tu aimes vraiment l'autre.
Mais ça tu comprends que c'est possible quand tu le vois dans les yeux de Raimu, parce ces yeux là ces expressions tu les verras jamais chez personne d'autre. Alors, vous m'escagassez avec vos c'est trop ceci, c'est pas assez cela, c'est du grand cinéma de chez nous et c'est tout ! Et puis, si vous voulez, je vous la récite la tirade de la pomponette, parce peut-être vous l'avez pas compris, mais
tout ce qu'il lui dit à la pauvre chatte c'est tout ce qu'il ose pas dire à sa femme, et même s'il lui pardonne le bougre, c'est qu'il pense d'elle à ce moment là, on appelle ça un trope :
"Té !…Regarde là, la Pomponnette qui revient manger la soupe du vieux Pompon: Garce!, Salooope!, Ordure!….Bien sûr, l’autre il était beaucoup plus beau, mais qu’est ce que ça veut dire!….C’est quand même pas parce que les lions sont plus forts que les lapins, que toutes les lapines doivent leur courir après en clignant de l’œil"
Créée
le 3 avr. 2024
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