Mickey 7/10
Fort de son dernier succès international avec Parasite (2019), c’est une nouvelle comédie noire sur fond de satire politique, à la production américaine cette fois-ci, que nous livre Bong Joon-Ho...
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le 17 févr. 2025
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La relative déception qui accompagne la sortie de Mickey 17 n'a finalement rien de surprenant, au vu des attentes probablement démesurées suscitées par le projet depuis sa genèse. Multi récompensé, palmé, oscarisé pour "Parasite" finalement très divertissant mais pas fondamentalement révélateur de toutes les "champs possibles" de son cinéma, Bong Joon Ho, bien que finalement happé par Hollywood et la Warner après quelques approches plus ou moins fructueuses dans l'idée d'apprivoiser et donc de brider le talent créatif du bonhomme (Harvey Weinstein pour Snowpiercer, Netflix pour Okja), continuera probablement longtemps à forger son identité loin de l'image de ces cinéastes consensuel, capables d'articuler leur art autour de créations grand public dans les standards actuels.
Evidemment, dans cette idée, imaginer que BJO puisse donner naissance à un grand film de Sf épique pouvant rivaliser avec les prétendus chefs-d'œuvre récents (on pense notamment aux objets de Dennis Villeneuve) ou même nous éblouir avec une vision prophétique et structurée de l'avenir de l'humanité, proche des "fils de l'homme" ou de "Blade Runner" (le vrai) relève de la croyance utopique. Si Mickey 17 devait de comparer, et s'inscrire dans le terreau fertile du cinéma d'anticipation, il s'envisagerait plus dans la filiation évidente du fabuleux "Moon" de Duncan Jones, accompagnée de l'irrévérence et la distanciation qui marquent irrémédiablement le style du cinéaste coréen.
Dès l'ouverture et les premières scènes qui, il faut l'avouer interrogent même les plus avertis, Mickey 17 à peine son propos posé, fait œuvre de déconstruction, notamment de la figure du héros : certes le numéro 17 de Mycki renvoie à son essence même celui de "remplaçable" volontaire utilisé comme animal de laboratoire afin d'apprivoiser l'environnement hostile de la planète Niflheim en développant des vaccins contre de virus qui lui sont inoculés, car l'homme une fois mort renaitra sous une nouvelle version (numéro) crachée par une imprimante 3D (Oui, la référence à Mickey 3D est une évidence même pour BJO !).
Mais ce Mickey, loin d'être un modèle est un être simple voire simplet, (le réalisateur avouera même avoir choisi R.Pattinson pour l'incarner car "il renvoie l’image de quelqu’un qu’on a envie de plaindre, le genre de personne qui se fait avoir et qui ne peut même pas s’en plaindre ») et même s'il est touchant, il ne peut pas servir de prétexte à un propos philosophique achevé sur l'exploitation des faibles par les puissants, car il a choisi lui-même d'être "remplaçant".
Comme à son habitude, le réal ironise, pourfend les mythes et c'est comme souvent dans l'absurde que se construit son propos : absurdité des situations, qui souvent échappent à toute logique et des êtres : Kenneth Marshall le gouverneur de la colonie, sa femme et surtout la meute de bouffons qui l'entourent sont des parfaits (et désolants) miroirs de certains politiques parmi les plus influents de la planète (idiots, parfois munis d'une tronçonneuse...) Le métrage prophétise sans mal, une société pré-apocalyptique malade, dirigée par des êtres résolument pathétiques (pourtant entourés de soutiens inconditionnels) , assoiffés de richesses et de pouvoir. Le trait est volontairement forcé, la satire féroce dans le réalisme froid qu'elle convoque, est assez inhabituelle et dérangeante dans la noirceur qu'elle imprime au récit.
Evidemment, et même si certains ont prétendu, probablement à raison que les reports de dates de sortie ressortaient de profondes divergences d'opinions entre un auteur bénéficiant contractuellement du final cut et un studio (Warner Bros) tentant de garder un contrôle (au moins de bienséance) sur une œuvre qui lui échappait, il semble évident que notre palmé s'est astreint (volontairement ou non) à quelques regrettables concessions, introduisant notamment des éléments de narration consensuels et des personnages secondaires plus accessoires, dont les arcs narratifs expédiés amoindrissent le rythme voire le propos du film, au moins pour un temps...
Car après quelques scènes un tantinet redondantes et explicatives sur les doubles (et le clônage), Mickey 17, s'envole un peu tardivement, vers une fin tout à fait digne de ce que peut produire le bonhomme : une dynamique enivrante (et bordélique) s'empare du récit nous submerge de quelques éléments poétiques dans les scènes de dénouement assez époustouflantes de virtuosité, enfin le métrage devient ce qu'il promettait d'être : un (space) opéra bouffe élégant (Darius Khondji est à la photographie) qui s'ancre dans l'émotion
notamment lors de la magnifique scène de soulèvement des rampeurs (qui fait fortement écho au Nausicaä de Miyazaki) et dans un final où les défavorisés triomphent.
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