France 1945 - Les femmes deviennent éligibles au suffrage universel. Il est adopté définitivement en 1920 en Amérique du Nord.
États-Unis 1953 - Allan Dwan réalise La femme qui faillit être lynchée, un western dans un beau noir & blanc mettant en scène des femmes dans les rôles principaux.
Une analogie sans doute capillotractée, mais qui montre bien dans quelle configuration sort ce western aux États-Unis et en France un an plus tard. Il prend à contre-pied son genre installé depuis quelques décennies avec tous les clichés que cela implique.
Il a bien existé des films où la femme était au coeur de l'intrigue dans des rôles importants n'impliquant pas le rapport de soumission à l'homme, mais Allan Dwan et Steve Fisher, son scénariste, franchissent ici un cap. Pour la première fois, un western met les pieds dans une petite ville de l'ouest en pleine guerre de sécession dont les figures d'autorité sont des femmes, Delilah Courtney (Nina Varela) en étant une Maire intransigeante.
Avant même d'aborder ces thématiques de la femme au coeur de l'ouest, Allan Dwan dresse en quelques mots et plans classiques et efficaces, avec un humour grinçant, le portrait sans commune mesure de la loi de l'Ouest qui se solde souvent par un évènement de village que l'on nomme sobrement le lynchage.
L'affrontement au coeur de l'Histoire dépeint les portraits de Sally Maris (Joan Leslie) et Kate McCoy (***Audrey Totter*), deux femmes qui par la force des évènements doivent redoubler d'efforts pour rivaliser avec les figures dominantes de cet environnement. Mais quand des intérêts divergents les places l'une face à l'autre, la violence d'une bagarre de saloon semble bien plus viscérale. Le parallèle avec le western classique n'en est que plus ridiculisé par l'absurdité de ces conflits et d'égo. Au détour d'un duel classique opposant les deux femmes, une forme de jubilation cinématographique se produit. Comme si cette simple idée d'inversion des rôles prenait tout son sens.
La légèreté que dégage le long-métrage permet de rendre réaliste des situations où la femme prend le rôle de l'homme, volontairement mis en retrait sans pour autant n'être que de la figuration. Quantrill et son gang (Les frères James et Younger), par exemple, sont des personnalités imposantes. Mais cet échange des rôles montre de manière assez probante toute la futilité de certains clichés du Far West qu'ils soient réalistes et romancés.
Au délà de ce parallèle, le film se montre progressiste. Les choses changent. L'Allemagne nazie est vaincu, il faut maintenant reconstruire ce monde d'après guerre et comme après la guerre de Sécession, il va falloir compter sur toute l'humanité, femmes incluses.
Il est possible que cette interprétation aille plus loin que ce qu'a voulu raconter Allan Dwan, mais force est de constater que la résonance d'un film atypique tel que La femme qui faillit être lynchée a bien évolué, bien au delà même des préoccupations de l'époque.
La femme qui faillit être lynchée porte aujourd'hui un double message universel de son temps et du nôtre.