De retour dans les Ardennes après 40 ans d'absence, Mireille investit la maison familiale délabrée et s'entoure de quelques figures pittoresques pour redonner vie à la demeure. On voit bien où veut nous amener Yolande Moreau en conviant ces messieurs dans une bâtisse transformée en pension de famille et partageant avec Mireille une solitude, une certaine marginalité
(Bernard, jardinier le jour et travesti la nuit, Elvis, faux chanteur américain mai vrai réfugié turc...)
et, peut-être, comme leur hôtesse, un passé douteux ou douloureux. Le ton nostalgique du début du film, avec l'arrivée de Mireille dans la campagne ardennaise, est engageant. Mais curieusement, à partir de là, ce n'est pas la poésie qui s'installe mais une certaine trivialité tant la réalisatrice force le trait à propos de ces gens simples, un petit peu éclopés par la vie. La maladresse des portraits et de la mise en scène maintient l'existence de la petite communauté dans l'artifice d'où ne survient ni l'émotion ni le charme qu'on attendait parce que les textes sont faibles, le dessein de Yolande Moreau trop explicite ( ainsi la façon de révéler petit à petit le passé de son personnage). La survenue en cours de film de son amour de jeunesse jamais oublié entérine cette gaucherie d'ensemble, et la relation qui renaît entre elle et lui (Sergi Lopes) exprime un prosaisme assez plat, dépourvu de grâce et de sensibilité, de sorte que leur nostalgie commune tourne à vide. Les bonnes intentions de Yolande Moreau ne sont certes pas insincères. Lorgnant du côté de Rimbaud ou Jean Vigo, son film est une peinture naive. Sa cocasserie y est le plus souvent vaine et ses instants de mélancolie ne nous touchent pas.