la Splendeur dans l'herbe

J'étais persuadé que ce film était tiré d'un roman américain, mais il n'en est rien, c'est un scénario fort et complexe qui permet à Elia Kazan de signer un de ses plus beaux films. Bon d'accord, j'ai noté 7/10 seulement, mais il faut dire que ce genre de sujet n'est pas trop dans mes préférences ; cependant, je ne peux qu'objectivement reconnaître que la splendeur n'est pas que dans l'herbe (allusion au titre original qui reprend un poème de Wordsworth), mais aussi dans la forme et le propos développés par Kazan qui situe l'action en 1929, juste avant le krach de Wall Street..
Il y traite plusieurs thèmes qu'on retrouvera dans ses films, et en cela, le sujet est très proche de A l'Est d'Eden. Il s'agit des premiers vacillements des valeurs familiales fondées sur l'argent ; Kazan évoque tour à tour l'indécision amoureuse des jeunes gens, la nécessité de faire les bons choix pour l'avenir, le conflit entre l'ancien et le nouveau, le poids parental dans les décisions, la lourdeur d'un monde figé, le tout à travers 2 portraits de jeunes gens magnifiquement interprétés par le jeune Warren Beatty et Natalie Wood qui se montre parfois bouleversante. Tous deux voient leur amour détruit à cause des préjugés et des conventions sociales, ils sont constamment au bord d'un abîme, tout repose sur eux, et leurs émotions sont frémissantes. A travers le portrait féroce d'un père possessif, tyrannique et enrichi par le pétrole (superbe Pat Hingle), Kazan dépeint aussi une analyse sociale pertinente et une réflexion intéressante sur l'écroulement du temps, dénonçant ainsi le matérialisme et le puritanisme dans cette époque de grande dépression. On retient également un beau portrait de nymphomane extravertie incarnée par Barbara Loden.
Un mélodrame puissant, chargé en émotion et animé d'une fébrilité esthétique, à la violence psychologique, où s'étalent de façon incandescente tous les tourments de la solitude et du désespoir pour aboutir à un beau gâchis, le tout porté par 2 jeunes acteurs qui semblent avoir une sorte de lien charnel avec leur personnage.