Et l'ombrelle s'envola...
Période faste de David Lean, qui vient d'être encensé par le public et la critique pour "Lawrence d'Arabie" et dont le succès de "Docteur Jivago" a tout simplement permis à la MGM de réaliser son plus gros succès depuis "Autant en emporte le vent".
Avec "La Fille de Ryan", sorti en 1970, il adapte très librement "Madame Bovary" de Gustave Flaubert et nous emmène dans un village sur la côté Irlandaise durant la première guerre mondiale et surtout l'insurrection de Pâque où une jeune femme qui rêve et s'ennuie Rosy Ryan, fille d'un tenancier qui l'a couvée et choyé toute son enfance, fini par épouser un instituteur de quinze ans son ainé mais va tomber amoureuse d'un officier Anglais en convalescence et de passage...
Dès le début et les premières scènes sur la plage, on est immergé avec les protagonistes et surtout Sarah dans cette histoire et notamment grâce à la réalisation de David Lean. C'est esthétiquement magnifique, il sublime les paysages Irlandais (qui sont déjà magnifique !) et nous offre de superbes images et scènes grâce à ses plans et son utilisation de la luminosité.
Ensuite, il prend le temps de nous présenter les personnages et de mettre en place le récit et l'histoire, notamment sa relation avec cet instituteur qui laissera place à la passion aussi intense que fulgurante et impossible avec "l'ennemi Anglais" et il donne un côté romantique et lyrique qui en devient émouvant et nous emporte.
Mais dans le même temps, il décrit la résistance interne des Irlandais face aux Anglais, mais de manière juste et subtile sans tomber dans l’héroïsme bêta et le manichéisme à l'image de cette foule nationaliste et héroïque lorsqu'il s'agit de repousser et contester l’ennemi mais prêt au plus lâche des lynchages lorsqu'il faut trouver un coupable et accepter une autre façon de penser que la leur.
David Lean maitrise tous les éléments de la fresque, que ce soit à travers sa puissante mise en scène, le rythme du récit, l'utilisation de la superbe musique ou encore les images et scènes marquantes que ce soit celle sur la plage, durant la tempête ou ce lynchage.
En plus d'être bien écrit et passionnant, les personnages sont aussi bien interprétés et notamment Robert Mitchum dans un rôle à contre-emploi, Sarah Miles dans celui de cette jeune femme rêveuse, sensuelle, romantique et inoubliable notamment sur cette plage ou encore Trevor Howard dans celui du père Collins.
Comme il savait si bien les faire, David Lean nous livre une grande, humaine et magnifique fresque mais cette fois-ci, le succès ne sera pas au rende-vous, notamment de la part de la critique qui l’assassinera. Il attendra une quinzaine d'années pour tourner un nouveau et dernier film.