La fille du 14 juillet est construit comme un film de vacances. A priori le film engendre un mouvement, celui d’une fuite en avant. On est à Paris, on vient de finir ses études, alors on cherche du boulot. Or il n’y a pas de boulot ni de possibilité de travailler, donc on part en vacances.
Le mouvement dessiné par le film rejoint alors celui du road movie. Or l’archétype du road movie c’est de tenter de fuir vers un horizon qui s’avère n’être qu’illusion et donc de foncer droit dans le mur. Ce n’est pas tout à fait le mouvement du film. Certes, ici aussi l’horizon est bouché et convie à faire demi-tour. Lorsque la bande d’amis partent vers le sud, vers la mer et qu’ils arrivent à destination, ils apprennent que les vacances sont supprimées pour lutter face à la crise. Il n’y a plus de vacances, il faut donc revenir. Mais le retour n’aura pas lieu, ni même la collision dans le mur. Et si le road movie engendrait autrefois une profonde désillusion et un certain pessimisme, ici le parfum libertaire n’est pas usurpé. Si une barrière se dresse au milieu de la voie, on fonce dedans et on continue. On reste en vacances.
Mais cette fuite en avant est associée à une fuite en arrière. Cette fuite en arrière c’est le retour aux années 60/70. Ce retour est d’une part le moteur et le modèle qui permet d’enclencher la fuite en avant. Comme s’il fallait revenir ou repenser à cette période, à mai 68, aux échappées libertaires, aux mouvements contestataires et révolutionnaires pour faire front dans la France actuelle. Mais ce retour semble également être un vrai retour, c’est-à-dire un besoin de revenir aux sources, à une période fantasmée. Le film est alors tiraillé entre modernité et envie d’aller de l’avant, et nostalgie et regard vers l’arrière.
Cette évocation des années 60/70, ce retour, se traduit par les références employées. Le film serait une sorte de mélange de Max Pécas, de Rozier, de Godard, de Zidi,… Plus ou moins bien ingérées, ces références sont malgré tout travaillées et redéfinies pour aboutir à quelque chose de protéiforme qui évoluerait dans le paysage français actuel, et tenterait d’en faire sauter les bordures.
L’étrangeté principale du film, et son côté le plus beau, se trouve peut être dans cette aberration, du moins ce dysfonctionnement qui émane de la confrontation et l’échange entre deux époques. A l’écran ça donne des choses étonnantes, des scènes, des gags, ratés, volontairement ou non, mais qui paraissent ne pas pouvoir exister dans la société actuelle, dans le contexte politique et social d’aujourd’hui. Le film construit sans cesse des dérèglements, des anomalies, et finit par n’être plus qu’une lutte incessante. Et c’est bien, avant tout, par l’utilisation qu’il fait du comique (visuel et dialogué), de l’humour, par cette absurdité permanente, par son non-sens que le film devient « révolutionnaire », en tout cas contestataire. Si le film est porté par un vent de fraicheur et de folie, aussi drôle que léger, s’il semble ne s’attarder que sur des amourettes, des chassés-croisés garçons-filles, il est, aussi, une geste politique aussi fort qu’impuissant.
Teklow13
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le 6 juin 2013

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