C'est peu que je n'attendais rien de ce film d'André Téchiné, car je ne savais pas de quoi il parlait, et j'ai été agréablement surpris. C'est tiré d'un fait divers qui a mis la France en émoi à la fin des années 1990 : une jeune femme sans histoire qui décide d'un coup de se scarifier, de se dessiner des croix gammées sur le ventre, et dont l'agression supposée va avoir des accents antisémites, provoquant l'ire de la population.
Ce que j'aime dans ce film, c'est que Téchiné ne donne pas de motivations sur les raisons de ce geste fou de cette jeune femme, remarquablement interprété par Emilie Dequenne. Est-ce pour vivre aux yeux des autres ? Auprès de sa mère, qui est occupée à jouer avec les autres enfants de son quartier ? A expulser un chagrin d'amour, avec Nicolas Duvauchelle ? On ne le saura jamais, et c'est très bien comme ça, avec l'autre particularité est que le début du film est rythmé par les va-et-vient incessants du RER, donnant une répétitivité à cette vie qui ne demande qu'à être secouée.
Bien que cette histoire soit passionnante, je regrette tout de même qu'il y ait un sentiment de rallonge dans tout ça, notamment tout ce qui concerne la famille de Michel Blanc, qui joue un avocat ayant eu une histoire avec Catherine Deneuve dans le passé et dont elle demande à défendre sa fille au nom de leur amitié. Le personnage de Blanc a une réelle signification dans l'histoire, mais que viennent faire Ronit Elkabetz et Mathieu Demy, à part incarner un ancien couple sur un air de je t'aime moi non plus ? Quant à la bar-mitzvah de leur fils, je n'ai pas saisi l'intérêt d'en faire autant.
Dommage, car le film est passé très près de l'excellence, en particulier grâce à son opacité sur cette jeune femme, sans doute en quête d'amour en chevauchant ses rollers.