On oublie souvent que cette comédie endiablée de Gérard Oury est une parodie de "Ruy Blas", drame romantique de Victor Hugo, repensé en fonction du tandem Bourvil-Louis De Funès. On sait que le décès de Bourvil obligea Oury et sa fille scénariste Danièle Thompson à une modification de projet alors que le rôle de Blaze était pratiquement écrit ; Yves Montand accepta de reprendre le rôle à condition qu'il soit remanié pour lui.
Cette annonce surprit en 1971, j'étais très jeune mais je me souviens avoir lu dans Ciné-Revue que Montand n'était pas à sa place, je vis le film pourtant bien plus tard à la télé, et j'ai constaté que tous les critiques encore une fois, racontaient n'importe quoi : Montand joue un valet de comédie dans l'humour en demi-teinte, pas comme l'aurait fait Bourvil, mais il est pourtant excellent dans un registre difficile à tenir face à son trépidant partenaire dont l'agitation burlesque semble bien évidemment tirer la couverture à lui, sans parler de scènes mémorables comme le coup des pièces : Monseignor, il est l'or, l'or de se réveiller, il est huit or ! Il en manque une ! Vous êtes sor ? Tout à fait sor ! Montand a donc un peu de mal à rabattre la faconde defunèsienne, mais il est quand même là, et n'oublions pas qu'il avait déjà versé dans le comique léger, notamment chez De Broca dans le Diable par la queue.
Sinon c'est un festival De Funès qui encore une fois joue les mielleux hypocrites devant les puissants et écrase les petits, à cela s'ajoutent des quiproquos à gogo et l'absurdité d'une mécanique du rire, avec des séquences fameuses comme le strip-tease de la duègne incarnée par Alice Sapritch ou la scène du bain, ainsi qu' une belle reconstitution artistique de la Renaissance espagnole en Andalousie qui font de cette farce énorme un bon divertissement qui passe et repasse à la télé, on ne s'en lasse pas parce que Gérard Oury lorsqu'il faisait du Oury, pouvait livrer une comédie française soignée et sans vulgarité, remplie de ressorts comiques bien écrits, ce qui n'est plus le cas de nos jours.